Animation de communauté: on ne dope pas l’audience, on la construit

Le 23 juillet 2009

Un article du Monde se penche sur les animateurs de communautés qui commencent à apparaître dans les médias français quelques années après leur émergence les médias américains et britanniques. Ecrit par Xavier Ternisien, cet article me semble appeler plusieurs commentaires de la part du créateur/animateur de communauté et néanmoins journaliste que je suis depuis deux ans. [Ce [...]

Un article du Monde se penche sur les animateurs de communautés qui commencent à apparaître dans les médias français quelques années après leur émergence les médias américains et britanniques. Ecrit par Xavier Ternisien, cet article me semble appeler plusieurs commentaires de la part du créateur/animateur de communauté et néanmoins journaliste que je suis depuis deux ans. [Ce billet était au départ un commentaire déposé du FriendFeed]

L’article me semble un peu réducteur. Son titre surtout: “Sur le Net, des journalistes se muent en animateurs pour doper les audiences”. L’animation de communauté n’a pas grand chose à voir avec du dopage, c’est même tout l’inverse: un travail de fond pour des résultats d’audience très progressifs. Les Marco Pantani qui grimpent les sommets des statistiques de fréquentationutilisent d’autres techniques.

Je passerais sans m’attarder sur la condescendance du titre qui assure que les “journalistes se muent en animateurs”. Depuis le portrait-robot du journaliste multimédia (qui date de 2 ans), j’ai pu constater que le fait de dialoguer avec l’audience était souvent une perspective effrayante pour les journalistes.

Quelles sont les idées qui sous-tendent l’idée de communauté pour les médias? Il y en a deux principales, je crois.

La première est de considérer que quelque chose peut émerger du dialogue avec l’audience dans la mesure où le journaliste n’est pas omniscient. C’est qui est dit dans le papier par Marie-Amélie Putallaz:

Sa première fonction est de modérer les commentaires des internautes. Elle n’aime pas ce mot : “Modérer, c’est laisser entendre qu’on coupe, qu’on censure. Mon rôle consiste aussi à valoriser les réactions des lecteurs, à les synthétiser.” Elle lance des appels à témoignage en rapport l’actualité. Au besoin, elle entre en contact avec les internautes par mail. “Je leur demande d’apporter des informations. En échange, ils me disent ce qu’ils veulent voir et entendre. Je suis un peu l’ambassadrice des internautes auprès de la rédaction.”

Au delà de cela, il me semble que l’une des dimensions communautaires essentielles pour les médias n’est pas abordée dans l’article du Monde. Créer une communauté autour de son média, c’est (re)créer une forme d’attachement, un lien affectif entre le média et l’internaute. C’est au final créer d’autres raisons de revenir sur le site que le simple fait d’y trouver des informations. On sait aujourd’hui que l’info ne fidélise pas, que les sources sont innombrables et que l’internaute est volage. En revanche, on sait aussi que la perspective de retrouver une communauté est un élément de fidélisation (stickyness diraient les Américains).

Le problème, c’est que l’on peut imaginer que les médias vont être de plus en plus nombreux à vouloir “recruter” les internautes les plus pertinents et efficaces en matière de veille/recherche/exploitation/vérification/mise en perspective de l’information. Hypothèse: ces internautes vont choisir de contribuer dans les communautés où l’échange symbolique (à défaut de pécuniaire) sera le plus important. Il est donc essentiel de se positionner vite et bien pour les médias de manière à constituer des communautés cohérentes en expérimentant ce que peuvent être les termes de l’échange avec les internautes. Et ils sont multiples. C’est que Marie-Amélie sous-entend, je crois, en disant: “Mon rôle consiste aussi à valoriser les réactions des lecteurs, à les synthétiser.” Le rôle consiste aussi à former les internautes (cf. le coach de Le Post.fr) comme cela avait été mis en avant lors du 1er sommet du journalisme en réseau (Networked journalism):

Si les journalistes deviennent membres de la collectivité avec laquelle ils pratiquent le co-journalisme, leur position change. Il est question d’échange de savoir (ou savoir-faire) entre le journaliste et la collectivité et non plus d’échange d’information seulement. Et l’une des compétences du journaliste est de savoir organiser cette collectivité.

On n’est vraiment pas dans le dopage.

Je termine avec 10 conseils pour animer une communauté en ligne (un peu ancien mais toujours d’actualité) et une suggestion: et si on se faisait un apéro “Virenque” avec ceux qui dopent l’audience à l’insu de leur plein gré.

Article initialement publié sur Samsanews

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