L’Information ne nous appartient pas, alors partageons-la !

Le 22 décembre 2009

[...] Pourquoi diable irions-nous en effet sciemment mettre en danger l’intégrité de notre hiérarchie de l’information en acceptant que des amateurs y participent ? Peut-être parce que l’ADN même de l’information est en train de changer. Parce que c’est la notion même de « hiérarchie », par essence verticale, qui se désintègre progressivement au contact des «conversations entre êtres humains connectés, des conversations qui étaient tout simplement impossibles à l’ère des médias de masse» ...

{Billet publié initialement dans la revue « Journalistes », édité par l’Association des Journalistes Professionnels de Belgique, qui consacre sa dernière édition à la thématique : « Des amateurs sur le terrain de l’information. Danger ?« }

L’épisode I Have News nous interroge sur la manière d’exploiter le potentiel de co-création de valeur ajoutée que le web et les réseaux sociaux laissent entrevoir dans nos processus journalistiques. Ne comptez pas sur moi pour jouer ici les donneurs de leçons, je n’en n’ai ni les moyens ni l’ambition, mais, puisque l’on m’y invite, à partager avec vous quelques réflexions sur ces liens qui nous unissent à ceux que l’on avait coutume d’appeler « Audience »

C’est un fait, les commentaires des internautes à propos de nos productions nous laissent parfois un goût amer, souvent de trop peu, qui de prime abord ne nous incitent pas à ouvrir plus grand les vannes de l’interactivité. C’est à la fois parfaitement compréhensible et en même temps bigrement frustrant.

Pourquoi diable irions-nous en effet sciemment mettre en danger l’intégrité de notre hiérarchie de l’information en acceptant que des amateurs y participent ?

Peut-être parce que l’ADN même de l’information est en train de changer. Parce que c’est la notion même de « hiérarchie », par essence verticale, qui se désintègre progressivement au contact des «conversations entre êtres humains connectés, des conversations qui étaient tout simplement impossibles à l’ère des médias de masse».

Le web, le mobile et la télévision interactive « délivrent » l’info en y intégrant une évidence fondamentale issue de ces conversations: si elle a bel et bien un coût, l’information n’appartient toutefois à personne. Pas plus à Murdoch qu’à Google. Pas moins à Copiepresse qu’à Tartenpion. Seul compte l’usage que l’on en fait et le sens que l’on y apporte dans un contexte particulier.

Que faire alors ? Eriger des murs pour tenter de retrouver l’illusion rassurante du contrôle que les cycles de bouclage de nos éditions nous apportaient ou bien « lâcher prise avec dignité« , comme le suggère Eric Scherer, directeur Stratégique à l’AFP , et construire ces espaces propices à la co-création de valeur ajoutée grâce aux leviers d’une interactivité éventuellement débarrassée des sms surtaxés ?

Cette stratégie, car c’en est une, ne signifierait nullement renoncer aux valeurs qui ont patiemment participé à la construction de la crédibilité de nos médias mais, au contraire, la renforcerait en intégrant la diffusion de l’information comme une étape certes importante, mais non plus comme une fin en soi.

Conjuguer la force de l’analyse, de la prise de recul et de la contextualisation avec la puissance des hyperliens, des algorithmes de recherche et des conversations entre individus de bonne volonté m’apparaît comme le chantier le plus excitant à mener actuellement au sein d’une rédaction. Celles qui réussiront à mettre en formes ces équations à multiples inconnues continueront à coup sûr à se rendre indispensables dans l’espace démocratique et économique. Les autres, tout aussi certainement, beaucoup moins.

» Article initialement publié sur Blogging The News (commentaires à lire /-)

» Image de Une via Portobeseno sur Flickr

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