A propos de l’extimité

Le 8 janvier 2010

En 2001, la France découvre Loft Story. On y voit crument exposé sous la forme d’un jeu des mécanismes d’exclusion et de surveillance généralisée [...] : beaucoup y voient le signe d’une dégradation du lien social...

En 2001, la France découvre Loft Story. On y voit crument exposé sous la forme d’un jeu des mécanismes d’exclusion et de surveillance généralisée . Les candidats du loft sont exclus les uns après les autres par des votes des lofteurs et du public et leur quotidien est filmé 24 heures sur 24 et sept jours sur sept. Première émission de télé réalité diffusée en France, Loft Story suscite un grand nombre de commentaires et de critiques : beaucoup y voient le signe d’une  dégradation du lien social.

C’est dans ce contexte que Serge Tisseron publie L’intimité surexposée. Il y reprend de Jacques Lacan le terme d’extimité pour rendre compte de l’expérience vécue des lofteurs : il s’agit moins d’exhibitionnisme que d’une dynamique psychique particulière.

L’extimité n’est pas l’exhibitionnisme. Un exhibitionnisme montre une partie de lui à un public qui généralement ne veut rien en voir. Il est pris dans un scénario fantasmatique très contraignant, et le plaisir ne peut être obtenu que si les choses se passent exactement comme prévues dans le scénario. Etre reconnu n’entre pas en ligne de compte, et souvent l’exhibitionniste préférera ne pas l’être.

L’extimité est “le mouvement qui pousse chacun à mettre en avant une partie de sa vie intime, autant physique que psychique” (S. Tisseron). Il s’agit d’un mouvement de balancier par lequel nous identifions tantôt l’autre à notre personne tantôt notre personne à l’autre. Dans le premier moment, ce que l’autre a de différent est peu à peu atténué jusqu’au dénominateur commun. Les différences sont effacées jusqu’a ce que ne subsistent plus que le dénominateur commun. Le mécanisme me semble être le même que celui de l’identification hystérique qui se base sur un désir commun. Dans second moment, la personne s’identifie à l’autre. Le mouvement est centrifuge et non plus centripète. Ce qui est important, c’est la différence entre le soi et l’autre, différence que le mouvement d’identification va tenter de combler

L’extimité n’est pas donc une simple mise “hors soi”. Ce n’est pas une simple expression. C’est une expression en attente de l’autre et qui ne trouve son plein sens que dans le poinçon que lui donne l’autre. Est extime ce qui est aux marches du Self. L’extime, ce sont ces comptoirs lointains dans lesquels nous faisons commerce avec ce qui est à nos frontières; L’extime c’est ce qui est à l’horizon de moi-même. ce qui de moi même est in extremis. Il faut entendre ici extrême comme ce qui est démesuré, monstrueux au sens de cette chose qui se montre (monstrare) et qui nous averti (monstrum). C’est aussi ce qui est à l’extrémité de moi même, et que je ne peux presque plus re-tenir. . Mais c’est aussi ce qui vient à moi et que j’attrape au dernier moment.

» Article initialement publié sur Psy et Geek

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