Un journaliste payé par ses lecteurs ?

Le 15 février 2010

L’hebdomadaire culturel Télérama vient de publier mercredi un assez bon article intitulé Journaliste à louer. Le papier pose notamment cette question : un lecteur peut-il directement financer le travail d’un journaliste ?

L’hebdomadaire culturel Télérama vient de publier mercredi un assez bon article intitulé Journaliste à louer. Le papier pose notamment cette question : un lecteur peut-il directement financer le travail d’un journaliste ?

Certes, l’idée du « crowdsfunding » (« financement par la foule ») n’est pas nouvelle ; elle est aujourd’hui très tendance et parfois un peu « tarte à la crème » (le financement d’une partie du travail journalistique par les lecteurs, c’est quand même l’un des piliers de l’économie de la presse écrite).

Mais cette idée d’instaurer une relation directe entre un journaliste et une communauté d’internaute-financeurs, n’en constitue pas moins une piste intéressante pour l’avenir de notre métier. Elle a le mérite de redonner de la valeur au travail de qualité.

Et à ce petit jeu là, il me semble que les journalistes et photojournalistes indépendants, plus réactifs, plus conscients de leur « valeur » et de leur « marque », habitués à jongler avec les financements multiples, sont les mieux a même de tirer leur épingle du jeu.

En tout, cela donne envie d’être testé grandeur nature :) !

Voici donc quelques liens pour aller plus loin + quelques réflexions personnelles. Cette sélection et ses idées sont bien évidemment ouvertes aux suggestions et ajouts.

1. Le principe du « crowdfunding »

Journaliste à louer

Le papier original de Télérama signé Emmanuelle Anizon

Le crowdfounding et ses limites

Une analyste intéressante par un jeune journaliste, Florent Chevallier.

Lessons in crowdfunding (en anglais)

Retour d’expérience passionnant par David Cohn, fondateur de Spot.us (dont on peut retrouver l’interview sur Espritblog ici).

2. Les expériences menées

Le photojournaliste Zoriah

(et tout récemment Frédéric Sautereau, de l’Oeil Public)

La journaliste américaine Paige Williams

Cette journaliste freelance américain a  lancé un appel au don pour un projet de reportage estimé à 2000 dollars.

- Le projet Spot.us

Pour ceux qui ne connaissent pas, ce projet américain permet aux internautes intéressés par une problématique locale de financer le travail d’investigation d’un journaliste freelance.

Spot.Us – for reporters

A titre personnel, voici simplement quelques réflexions en vrac (et à enrichir).

- La communauté d’internautes-lecteurs ne pourra jamais être l’unique source de financement d’un reportage ou d’une enquête (voir le panorama des pistes possibles sur ce très bon post de blog de Pierre Morel).

- Le processus ne peut être qu’artisanal et direct, établissant une relation de confiance entre le journaliste et ses contributeurs. Pas d’intermédiaire.

- Il faut évidemment avoir su tisser une communauté autour de son travail. La communauté est différente d’un réseau : ce n’est pas à qui aura le plus d’amis sur Twitter ou Facebook, mais à qui aura su fédérer des fidèles sur un travail journalistique donné (comme peuvent le faire certains blogueurs-journalistes).

- le contributeur paiera pour un projet à valeur ajoutée (reportage, investigation), pas pour des tweets, de l’analyse, de la veille ou des papiers « bas de gamme ». Le contributeur paiera donc pour de l’information « rare » et pour des sujets « magazine » (donc moins périssable), pas pour du news.

- le contributeur ne s’engagera pas financièrement sur un « projet » ou un « synopsis ». Il faut déjà que le journaliste soit déjà  engagé dans la démarche, qu’il ait fait ses preuves, qu’il ait de la matière à montrer pour attirer le chaland !

- le journaliste doit donner de sa personne. L’argument de dire « donnez-moi, parce que mon travail est important » ne suffit pas ; il faut susciter le désir de donner, convaincre, partager, donner un peu de « chair » à ses motivations. Bloguer est surement le moyen le plus simple de le faire.

- Le contributeur ne paiera jamais pour « rien ». Il faut une « compensation », une « exclusivité » : un livre à la clé, l’accès à un contenu exclusif, une rencontre avec le journaliste…

- la transparence (relative, il ne s’agit pas de justifier chaque ticket de métro dépensé !) sur l’utilisation de l’argent est une nécessité.

» Billet initialement publié sur Espritblog

» Photo d’illustration alancleaver_2000 sur Flickr

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