“Shoot to thrill”, Iron Man superstar

Le 17 avril 2010

Dans les salles du monde entier, débarquera (à nouveau) Iron Man, dans le nouvel opus de ses aventures au cinéma. L’occasion pour nous d’analyser ce  personnage tiré du comic-book éponyme de la mythologie Marvel, car ce super-héros est loin d’être comme les autres. A l’instar de Batman chez DC Comics (éternels rivaux de Marvel), Iron Man [...]

Dans les salles du monde entier, débarquera (à nouveau) Iron Man, dans le nouvel opus de ses aventures au cinéma. L’occasion pour nous d’analyser ce  personnage tiré du comic-book éponyme de la mythologie Marvel, car ce super-héros est loin d’être comme les autres. A l’instar de Batman chez DC Comics (éternels rivaux de Marvel), Iron Man présente un héros solitaire, milliardaire et philanthrope qui choisit de mener une double vie de vengeur masqué. Comme Bruce Wayne, Tony Stark évolue dans un monde d’argent et de pouvoir qu’il finit par troquer pour une panoplie high-tech qui l’aidera à devenir ce justicier qu’il idéalise. Malgré le succès du film The Dark Knight, c’est pourtant Iron Man qui est aujourd’hui le plus intéressant sur le fond… et dans la forme, dans un court extrait officiel d’Iron Man 2 que nous allons décortiquer.

Tout d’abord, au début du premier film, le personnage de Tony Stark (interprété par Robert Downey Jr.) est présenté comme un playboy, riche héritier de la société que lui a légué son père à sa mort : Stark Industries. Cette entreprise privée a engrangé des milliards de dollars dans la conception d’armes de guerre et le développement de technologies militaires revendues par la suite, notamment à l’armée américaine. Tony Stark devient une caricature cyniquement parodique du lobby militaro-industriel lorsqu’il lève son verre à la paix dans le monde une fois la présentation de son dernier modèle de missile faite au beau milieu du désert afghan. Mais c’était sans compter le 11 septembre 2001.

Sur le chemin du retour, il se fait kidnapper par un groupuscule terroriste qui l’oblige de leur construire de nouvelles armes. La première scène du film se finit sur le tournage d’une vidéo de propagande dont il est l’otage, preuve que les codes de ces séquences de chantage est entrée dans la culture visuelle populaire. Tony Stark prend conscience de son activité quand il découvre que toutes les armes que possèdent ces terroristes sont estampillées du logo de sa société. Une fois libéré et de retour chez lui, Tony Stark annonce qu’il ferme la branche militaire de sa société pour ne se consacrer qu’aux énergies renouvelables, par exemple. En parallèle, il se créé une armure et décidera de se venger de ses ex-ravisseurs. Mais contrairement aux autres super-héros, il sortira de l’ombre en révélant publiquement sa véritable identité aux médias. N’est-ce pas la plus belle des fins ?

Tony Stark renonce peut être au marché d’armes, mais quand est-il des États-Unis ? Pas si sûr, déjà que le film lui-même est assisté directement par l’armée américaine. Prenons deux minutes de plaisir coupable pour regarder cet extrait d’Iron Man 2 :

Iron Man 2 commence donc sur les chapeaux de roues en nous dévoilant ce passage, déjà bien exploité dans les différentes bandes-annonces. Après une longue chute à travers les nuages et les feux d’artifice, notre héros en armure se retrouve sur la scène principale de la Stark Expo qui semble être un grand salon évènementiel des nouvelles technologies développées par sa société. D’ailleurs, l’équipe promotionnelle du film s’est chargée de créer un “site viral” de cette exposition aux Flushing Meadows, transformés ici en véritable parc d’attractions. L’adressehttp://www.starkexpo2010.com/ rassemble concepts, faux clips et un plan interactif des pavillons, bardés de logos fictifs affiliés à Stark Industries et réels (Kodak, Dr. Pepper, Burger King, Audi…).

Depuis la fin du premier épisode, le monde entier sait que le milliardaire Tony Stark se cache derrière Iron Man. Son entrée dans cette séquence ne doit rien au hasard. Iron Man atterri donc sous les projecteurs, offrant un spectacle à la foule en délire venue l’acclamer. Dans la fosse, on peut voir plusieurs personnes porter des gants lumineux, reprenant l’allure de cette partie du corps de l’armure désormais célèbre. De plus, il en va de même pour la tenue des danseuses présentes sur la scène. Les initiés l’auront remarqué, la toute dernière position de leur chorégraphie singe celle du super-héros lorsqu’il utilise l’arme à impulsion présente dans ses paumes. Accueillit comme une rock-star dans ce grand show à l’américaine, avec écrans géants, danseuses sexy, effets pyrotechniques et public hystérique, Iron Man est devenu véritable une icône.

Le choix de la chanson du groupe AC/DC n’est pas anodin et montre quelques ambiguïtés. Les vers “Shoot to thrill, play to kill” sont à traduire littéralement par : “Tirer pour électriser, jouer pour tuer”. Ces quelques mots résument encore trop bien ce rapport que les États-Unis entretiennent avec la guerre en général. Sous toutes ces paillettes, ce que la foule acclame ici reste en fin de compte une arme. La mise en scène de ce spectacle décomplexé avec le drapeau américain en toile de fond ne cherche pas non plus à faire la promotion de la NRA (l’association américaine pro-armes). La guerre semble ne rester qu’un jeu (vidéo ?) avec un Irak que les pires des citoyens américains interrogés situent sur une mappemonde en Australie, car ce conflit reste pour eux lointain. Tony Stark, figure emblématique de repentance sur les rapports entre l’oncle Sam et la guerre semble suffire à la bonne conscience de l’Amérique toute entière. Tel un Jésus Christ high-tech qui a payé pour les péchés des États-Unis, Tony Stark / Iron Man est devenu une idole de la culture pop, une “icône Disneyland” plus aguichante pour l’Américain lambda que des conflits éloignés en Irak ou en Afghanistan, bien moins sexy dans la forme…

Qu’en sera-t-il du message du film dans sa globalité ? Possible embryon de réponse le 28 avril prochain.

> Article initialement publié sur Culture Visuelle

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