De l’open à la freedata

Le 20 septembre 2010

Alors que Data Publica, annuaire de données publiques en France, vient d'être lancé, retour sur la question des licences applicables à ces données, au statut juridique complexe.

On évoque souvent la nécessité de libérer davantage la donnée publique. Et si on se penchait sur les données publiques déjà disponibles dont on ignore même l’existence ? Car Internet a aussi bien une face cachée qu’une face visible. La partie visible est traitée par les moteurs de recherche les plus courants, comme Google ou Yahoo qui brassent pas loin de 167 téraoctets d’informations. En deçà, pas moins de 91.000 téraoctets (500 fois plus) sont camouflés entre les pages dynamiques, les données privées, et bien d’autres encore1. Ce qu’il y a de plus cocasse, c’est que certains fichiers peuvent être disponibles sans que pour autant vous puissiez les utiliser car la loi ne vous y autorise pas.

Entre le droit des données publiques, le droit d’auteur, le droit des données personnelles et le droit qui s’applique à la structure des bases de données, pas facile de s’y retrouver. D’autant plus que la loi qui s’applique aux données publiques ne prend pas en compte le cas de la donnée publique « ouverte ». Trois starts-up (Araok, Nexedi et Talend) lancent Data Publica, annuaire de données publiques en France mis en place dans le cadre de l’Initiative Services Mobiles et présenté hier à la Cantine, et réfléchissent à des licences paramétrables conçues spécifiquement au regard de ces droits, de la nature des données et de la volonté de l’éditeur. Cette approche personnalisée s’inspire des licences creative commons ou encore des open database licences qui s’appliquent spécifiquement aux bases de données. Ces mêmes perspectives ont été soulignées l’année dernière par Jérôme Giusti, avocat au barreau de Paris, pour pallier à ce méli-mélo juridique.

Une logique de protection de la co-production

Recenser les données et créer des licences plurielles, Data Publica ne pouvait pas mieux tomber alors que les démarches de mises à disposition des données publiques fleurissent aux quatre coins de la planète. L’histoire a commencé aux États-Unis, impulsée par le gouvernement d’Obama. Un battement d’aile qui crée son tsunami à travers le monde. Depuis, l’Angleterre, l’Australie, le Japon, les pays nordiques et même la France s’y mettent. Pour autant, on ne sait pas très bien comment s’y prendre, quelles règles mettre en place et comment communiquer sur le sujet.

De-ci de-là, on entend aussi bien parler “d’ouverture” que de “libération” de la donnée. Dans le monde du logiciel, une différence très nette est faite entre l’open-software et le free-software. Le premier ne donne aucune paternité aux modifications du logiciel réalisées au fur et à mesure, le risque étant qu’un leader du marché s’en empare et en fasse sa propriété. A contrario, la logique de free-software identifie chaque participant et propose des licences creative commons pour chacune de leur intervention, soit une logique de protection de la co-production (voir la vidéo de Eben Moglen, professeur de droit et d’histoire du droit à l’école de droit de Columbia, avocat conseil de la Free Software Foundation et président du Software Freedom Law Center, sur ce sujet). Serions-nous en train d’acter le passage de l’opendata vers la freedata ?

Billet initialement publié sur le blog du Groupe Chronos

Image CC Flickr adulau

  1. Ces nombres ont été diffusés oralement au cours de la présentation de Data Publica à la Cantine, le 16 septembre 2010. []

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