Le procès Google

Le 19 avril 2011

Le Conseil des Prud’hommes de Paris se penchera bientôt sur le cas de la société Google France. Celle-ci affirme qu’elle respecte les règles sociales. Mais des documents obtenus par Owni la contredisent.

Le Conseil des Prud’hommes de Paris a jugé recevable les plaintes de deux cadres de Google France ; l’une pour licenciement abusif et l’autre pour incitation déloyale à la démission. Le Conseil des Prud’hommes vient de fixer les deux audiences au 21 septembre et au 18 novembre prochains. Contacté par Owni, l’avocat des deux plaignants, Lionel Paraire, a confirmé la réalité des deux procédures mais n’a pas voulu les commenter. Au siège de la société Google France, avenue de l’Opéra à Paris, la direction ne souhaite pas s’étendre sur le sujet. Sa porte-parole, Anne-Gabrielle Dauba-Pantanacce, nous répond par une règle de communication maison :

Nous ne commentons aucune information de nature juridique.

Selon des éléments du dossier que nous avons consulté, l’une des plaintes provient de l’ancienne responsable commerciale de Google France. Cette dernière dirigeait le département commercial de Doubleclick, le géant des courtiers en publicité sur Internet, quand la société a été rachetée par Google en mars 2008 (pdf). Les quelque 25 salariés qu’employait Doubleclick en France ont alors intégré les équipes de Google. Avant que plusieurs d’entre eux se voient pousser vers la sortie. Les magistrats spécialisés en droit du travail devront déterminer s’il s’agit de manœuvres déloyales.

D’ici là, au Conseil des Prud’hommes de Paris, des juges laissent entendre que le management de Google se distingue par d’étranges pratiques. Ils citent le cas d’un ancien cadre de la direction des ressources humaines de Google France, David X., parti en 2009 avec de très substantiels dommages et intérêts, en contrepartie de l’abandon d’une procédure gênante pour le groupe. Nous avons retrouvé un document consacré à ce contentieux. Il s’agit d’un procès-verbal de conciliation du 16 juin 2009 entre Google France et ce cadre de la société, qui a longtemps exercé les fonctions de directeur des recrutements pour l’Europe.

Le document, signé par les représentants de Google, prévoit que la société s’engage à verser à ce membre de la direction des ressources humaines :

À titre de dommages et intérêts bruts pour réparation du préjudice subi par son licenciement 77.000 € brut.

Dans les archives du Conseil des Prud’hommes de Paris, l’épisode n’apparaît pas comme un cas isolé. Le 20 novembre 2008, les magistrats avaient condamné Google à verser 30 000 € à un ancien coordinateur des ventes, licencié pour des motifs assez mystérieux, à en croire ce jugement que nous nous sommes procurés.

Actuellement, près de 180 personnes travaillent chez Google France. Une peccadille comparée à l’activité du moteur de recherche dans l’espace francophone. L’essentiel des revenus tirés du marché hexagonal est maintenant géré par « plusieurs centaines de Français basés en Irlande, dans les sociétés irlandaises du groupe », selon la porte-parole de Google. Un pays dont les actionnaires apprécient “les performances” au plan du droit du travail. Et qui permet de transférer les bénéfices du groupe dans des paradis fiscaux, sans risquer de mauvais procès.


Photo flickr CC Steve Rhodes

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