OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Steve Jobs sans sa pomme http://owni.fr/2011/08/25/lavenir-incertain-dapple-orphelin-steve-jobs/ http://owni.fr/2011/08/25/lavenir-incertain-dapple-orphelin-steve-jobs/#comments Thu, 25 Aug 2011 09:13:32 +0000 Romain Saillet http://owni.fr/?p=76927 Coup de tonnerre cette nuit : Steve Jobs démissionne de la direction d’Apple et suggère de lui laisser un poste honorifique. L’entreprise vivra avec difficulté le départ de son fondateur charismatique.

Tous les fans de la pomme vous le diront : Steve Jobs est un gourou du marketing, transformant chaque produit en or. Et de l’or, Apple en a amassé énormément avec lui. Un véritable trésor de guerre estimé à plus de 65 milliards de dollars. A titre de comparaison, la trésorerie de Google est de 37 milliards de dollars, et celle de Microsoft de 50 milliards de dollars.

Lorsqu’un chef d’entreprise est aussi charismatique et reconnu, voire adulé, que Steve Jobs, il est très difficile pour l’entreprise de poursuivre son action. Les acheteurs, investisseurs, actionnaires accordent leur confiance à l’entreprise, dans son innovation, mais aussi dans sa capacité à garder la tête pensante, souvent personnifiée par l’image de l’entrepreneur. Guy Loichemol, spécialiste de la communication financière chez Euro RSCG, analyse la position du dirigeant comme d’un visionnaire :

Les actionnaires ne s’y sont pas trompés. Ils croient en la pérennité de l’entreprise mais pas dans celle de son dirigeant. Certes, ça peut être considéré comme rassurant, mais la banalisation, la désacralisation du dirigeant est à terme néfaste puisqu’elle fait oublier la vision, que celui-ci se doit de porter.

Ce débat s’était déjà fait ressentir au sein d’Apple lorsque Steve Jobs avait pris congé de son poste en raison de problèmes de santé. De nombreuses voix s’étaient alors élevées pour critiquer l’incapacité d’Apple à innover sans lui.

En panne d’innovation

Le cas d’Apple est extrêmement spécifique puisque l’entreprise a déjà fait l’expérience d’une vie sans Steve Jobs entre 1985 et 1996 dont la pomme a failli ne pas se relever. Durant cette période, Apple n’innove plus et n’arrive pas à redonner du souffle à l’entreprise. Dès le retour de Steve Jobs, Apple redevient une entreprise innovante et disruptive avec l’arrivé de l’iMac, l’iPod, l’iPhone, l’iPad… révolutionnant ainsi les marchés de la musique, du téléphone et créant même un nouveau marché pour les tablettes.

Ce changement de directeur n’est pour autant pas aussi chaotique qu’en 1985, lors du premier départ de Steve Jobs. Les conditions sont incomparables. A l’époque Steve Jobs est licencié de sa propre société. Une guerre d’égo a fini par s’installer à la tête de l’entreprise. La perte de son fondateur s’était alors faite dans la douleur, coupant brutalement Apple de sa tête pensante. Aujourd’hui, la situation semble bien différente. Steve Jobs quitte de son plein gré son poste et recommande même son successeur dans les faits déjà à la tête d’Apple depuis les problèmes de santé de son directeur qui expliquent aujourd’hui son départ.

J’ai toujours dit que si, un jour, je ne pouvais plus remplir mes devoirs et répondre aux attentes en tant que directeur d’Apple, je serais le premier à le faire savoir. Malheureusement, ce jour est venu. Je démissionne donc en tant que directeur général d’Apple.

Le renouvellement de personnalité à la tête d’une entreprise aussi stratégique et importante qu’Apple demande un brin de stratégie et de tact. Cette décision demande une préparation de plusieurs mois, voire années pour éviter à l’entreprise un choc thermique pouvant être fatal. Prenons le cas de Microsoft qui a vu Bill Gates, son ancien directeur, et Steve Ballmer, son remplaçant, se livrer une guerre de pouvoir violente et destructrice.

Dès 2000, Bill Gates décide de laisser Microsoft à son ami de longue date Steve Ballmer. Pourtant, Bill Gates tarde à laisser le leadership à Steve Ballmer et une guerre d’égo éclate au sein de Microsoft. La passation semble difficile et les actionnaires et hauts responsables décident alors de clarifier la situation en mettant en place un planning stratégique de deux ans pour ne pas mettre en danger la compagnie. C’est le 27 juin 2008 que Bill Gates quitte définitivement Microsoft, Steve Ballmer se sera battu durant huit années pour accéder au leadership de Microsoft. La communication autour de ce passage du relais est la première différence flagrante entre Microsoft et Apple : aucun document ne permettait de prévoir un tel bouleversement.

De la part de Google, le passage de relais entre Eric Schmidt et Larry Page a été présenté sensiblement avec le même objectif qu’Apple : rassurer. Sur son blog, Eric Schmidt justifie cette réorganisation comme une opportunité pour Google d’être encore plus compétitif et réactif pour l’avenir.

How best to simplify our management structure and speed up decision making. [Comment simplifier au mieux notre structure manageriale et accélerer la prise de décision].

Au regard du communiqué de Steve Jobs, le message est très clair : rassurer les partenaires. Pour ce faire, l’ancien patron d’Apple souhaite garder une place stratégique afin d’assurer un suivi, d’apporter des suggestions et un véritable regard de stratège pour le futur de l’entreprise.

Je suis impatient d’observer et de contribuer à ce succès dans un nouveau rôle.

Ce poste en question dont parle Steve Jobs est celui de Chairman, soit président de l’entreprise Apple. Un poste clé, censé rassurer et conserver toute la confiance de l’entourage de l’entreprise. Steve Jobs en est sûr, avec ou sans lui : “Les jours les plus brillants et les plus innovants d’Apple sont à venir.”

Microsoft, société orpheline

Nous pourrions épiloguer longtemps sur la probabilité qu’Apple s’effondre ou survive à un tel bouleversement. Mais prenons du recul pour voir aujourd’hui comment Microsoft, société orpheline, voit son avenir avec son nouveau CEO : Steve Ballmer. Malheureusement pour Microsoft, l’avenir n’est pas aussi rose que l’on aurait pu le croire. Cette tendance s’exprime avant tout via les actionnaires et la valeur de l’action Microsoft, qui a chuté de 50% depuis l’an 2000, l’année de l’entrée de Steve Ballmer aux plus hautes fonctions de l’entreprise.

Il est vrai que Steve Ballmer a un style extrêmement différent de Bill Gates. Extravagant, haut en couleur et extraverti : Microsoft n’aurait pas pu trouver un directeur aussi antinomique à Bill Gates.

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Steve Ballmer est aussi critiqué pour sa communication parfois dangereuse pour la survie de Microsoft, surtout lorsqu’on parle du futur de Windows. Dernière erreur en date : l’annonce par Steve Ballmer d’une date de sortie prochaine de Windows 8. Rapidement démenti par Microsoft, la réaction des investisseurs ne s’est pas faite attendre. David Einhorn, président du fond d’investissement Greenlight Capital, l’un des plus importants actionnaires de Microsoft, s’est déclaré favorable à “donner à un autre la chance de diriger Microsoft.”

Aucune information ne permet aujourd’hui de connaître le futur d’Apple, et sa capacité à innover d’une part et surtout à galvaniser les foules pour vendre ses innovations. Les rumeurs prévoient l’arrivée d’une télévision brandée Apple dans les prochains mois. Peut-être l’occasion pour Tim Cook de démontrer ses capacités à vendre du rêve sans les charismatiques  “Amazing”, “Revolutionnary”, “Unbelivable” propres à Steve Jobs…

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Crédits Photo FlickR CC by-nc-sa osakasteve / by-nc djmfuentes

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Les Fab Labs, ou le néo-artisanat http://owni.fr/2011/05/29/les-fab-labs-ou-le-neo-artisanat/ http://owni.fr/2011/05/29/les-fab-labs-ou-le-neo-artisanat/#comments Sun, 29 May 2011 15:43:00 +0000 Vincent Truffy http://owni.fr/?p=65124 Dans Tintin et le lac aux requins, le professeur Tournesol invente un engin révolutionnaire : le photocopieur en trois dimensions. On met un objet d’un côté, un peu de pâte de l’autre et en un tournemain l’original est reproduit à l’identique. Une telle machine existe depuis quelques années sur un principe pas très éloigné de ce qu’avait imaginé Hergé.

On charge un modèle 3D dans la mémoire d’une imprimante qui, point par point, dépose des morceaux de colle, de plastique, de métal ou même de sucre selon les coordonnées spécifiées et recommence à l’étage suivant jusqu’à obtenir, par stratification, un objet en relief.

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Mais contrairement à la bande dessinée, aucun Rastapopoulos ne cherche à voler la RepRap (pour « réplication rapide ») parce que ses plans sont disponibles, librement, gratuitement, sous licence libre (GNU Public License), modifiables à volonté. Et que la machine sait même fabriquer ses propres pièces.

À vrai dire, il n’est pas absolument certain pourtant que le photocopieur de Tournesol, ou le synthétiseur de Star Trek ou un quelconque autre objet de science-fiction soit à l’origine des FabLabs. Il faut plutôt aller chercher du côté des obscurs cours d’éducation manuelle et technique où un professeur de collège en blouse bleue enseignait à utiliser la machine à coudre, la scie et la perceuse à des élèves qui n’en voulaient pas, persuadés que le savoir-faire les éloignait du savoir et que l’EMT les menait tout droit à l’enseignement professionnel.

Mais c’est un cours d’EMT deluxe, car il naît dans une grande université américaine, le Massachussetts Institute of Technology. Comme son nom l’indique, c’est la science appliquée qui est enseignée ici, et à un moment ou à un autre, l’étudiant doit réaliser le projet qu’il élabore. En 1998, le physicien Neil Gershenfeld prend donc la responsabilité d’un cours pratique de prototypage malicieusement intitulé « How to make (almost) anything » (Comment fabriquer (presque) n’importe quoi). On trouve dans son atelier de lourdes et coûteuses machines-outils capables de manipuler les gros volumes aussi bien que les atomes.

« Ils fabriquaient des objets pour un marché d’une personne »

Ses étudiants, apprentis ingénieurs mais sans bagage de technicien restent incrédules — « Ils demandaient: “Ça peut être enseigné au MIT ? Ça à l’air trop utile ?” », raconte Gerschenfeld. Mais très vite, il s’approprient le lieu, fabriquent un double des clés et reviennent nuitamment pour fabriquer « (presque) n’importe quoi », conformément à la promesse initiale. Beaucoup de petits objets à vocation plus artistique que technique. Une « scream buddy » [vidéo, en], par exemple, sorte de sac ventral qui étouffe le cri de colère lorsque celui-ci est inopportun, mais sait le libérer plus tard. Un réveil qui ne cesse de sonner que lorsqu’il s’est assuré que le dormeur est réellement réveillé… parce qu’il est capable de remporter un jeu contre lui… « Ils fabriquaient des objets pour un marché d’une personne », explique Gershenfeld.

Mais plutôt que de considérer ces réalisations comme de futiles broutilles, comme des errements potaches, l’universitaire s’aperçoit que ses étudiants ont réinventé l’échelon artisanal, celui qui se satisfait des matières premières locales et remplit des besoins particuliers que ne sait pas combler l’industrie, toute à son désir de s’adresser à une demande de masse, globale et indifférenciée.

En 2002, il ouvre le premier FabLab au MIT, doté d’un projet presque politique. D’abord, pose-t-il, « il s’agit de créer plutôt que de consommer » : la technologie est perçue comme un instrument d’émancipation. « La disparition des outils de notre horizon éducatif est le premier pas sur la voie de l’ignorance totale du monde d’artefacts dans lequel nous vivons, explique Matthew B. Crawford dans Éloge du carburateur (La Découverte). Ce que les gens ordinaires fabriquaient hier, aujourd’hui, ils l’achètent ; et ce qu’ils réparaient eux-mêmes, ils le remplacent intégralement. » Contre l’obsolescence programmé des biens de consommation, le savoir-faire ferait sortir de la dépendance :

Retour aux fondamentaux, donc. La caisse du moteur est fêlée, on voit le carburateur. Il est temps de tout démonter et de mettre les mains dans le cambouis…

Mais pourquoi faire soi-même ce que les professionnels fabriquent mieux et probablement pour moins cher ? Gerschenfeld rappelle la fameuse prédiction de Ken Olsen, fondateur de Digital Equipment, en 1977 : « There’s no need for a computer at home. » De la même façon, il n’y a aucune raison de disposer d’une usine à domicile, sauf si cela devient aussi anodin que l’informatique.

Au final, les centres de fabrication seront comme les PC, simplement des technologies dont les gens disposent.

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Les FabLabs vont au-delà de l’artisanat par leur capacité à exploiter le réseau : les usagers peuvent confronter leurs idées, les partager sur place comme à distance, les adapter à de nouveaux besoins et les améliorer sur le modèle du logiciel libre. Fabien Eychenne, chef de projet à la Fondation Internet nouvelle génération (FING) raconte par exemple qu’il a rencontré des élèves designers, disposant d’outils plus perfectionnés dans leur école, qui se rendaient dans un FabLab parce qu’on n’y était pas qu’entre designers.

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Le deuxième atelier a été ouvert en Norvège au-delà du cercle polaire, où les éleveurs de rennes avaient besoin de puces GPS bon marché pour localiser leurs animaux. Ce genre de besoins avec des enjeux très locaux, ne sont couverts ni par l’artisanat parce que trop techniques, ni par l’industrie parce que trop ponctuels et probablement non rentables. Gershenfeld a d’ailleurs obtenu une bourse de la National Science Foundation (NSF) pour organiser un réseau de FabLabs dans les pays du Sud : au Ghana (vidéo, en), pour fabriquer des filtres à eau, en Afghanistan pour reconstituer un réseau de télécommunications après la guerre, en Inde pour des instrument de diagnostics pour les moteurs de tracteurs, etc.

Il ne s’agit pas que d’une industrie du pauvre ou d’un mouvement de contestation du consumérisme. Chaque FabLab créé depuis que le réseau est lancé oriente son projet, lui donne une coloration: l’un plus artistique – le remix, le détournement, le sample appliqué aux arts plastiques –, l’autre plus militant – la base se réapproprie les outils de production –, le troisième axé sur l’innovation ascendante – on abaisse la barrière à l’innovation, de la même façon que le Web a abaissé la barrière à l’expression publique – ou encore écologique – la récupération, le recyclage.

À lire la charte des FabLabs, le business n’est pas absent :

« Des activités commerciales peuvent être incubées dans les Fab Labs, mais elles ne doivent pas faire obstacle à l’accès ouvert. Elles doivent (…) bénéficier à leur tour aux inventeurs, aux labs et aux réseaux qui ont contribué à leur succès. » A côté des open days où ils laissent les machines à la disposition de tous contre la promesse de reverser les innovations et les modèles à la collectivité, certains FabLabs proposent des journées privées, où l’usage des machines est payant, mais qui permet de développer rapidement des prototypes brevetables et de trouver un modèle économique. Ce faisant, c’est le brevet et le copyright qui finance l’innovation ouverte.

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A l’occasion de Futur en Seine (du 17 au 26 juin), la FING monte un FabLab temporaire à la Cité des sciences (niveau -1, carrefour numérique) pour familiariser le grand public avec ce néo-artisanat. Pendant les week-ends, les membres de la Fondation proposeront des visites et feront tester la découpe laser. Le mercredi, ils organiseront un FabLab Kids pour les enfants du quartier (avec notamment des expériences de circuits bending, c’est-à-dire le détournement des circuits électroniques des jouets pour leur faire faire autre chose que ce pourquoi ils sont prévus. Ils accueilleront des « makers » résidents appelés à réaliser en public les projets qu’ils ont déposés pour le Unlimited Design Contest et mèneront des actions de sensibilisation pour les industriels et les pouvoirs publics.

À lire : Makers : Faire société et Makers : Refabriquer la société
À voir : la conférence TED de Neil Gershenfeld

Merci à Véronique Routin et Fabien Eychenne, pour leurs renseignements.

Billet initialement publié sur Le bac à sable de Vincent Truffy, sous le titre « Fabulous Fab(Labs) »

Image de RepRap Flickr CC Paternité illustir

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La copie au service de l’innovation http://owni.fr/2011/05/17/copie-au-service-de-innovation-apple/ http://owni.fr/2011/05/17/copie-au-service-de-innovation-apple/#comments Tue, 17 May 2011 14:59:48 +0000 Benoit Raphaël http://owni.fr/?p=63061 J’ai entendu beaucoup de bêtises sur l’innovation. J’en ai dit quelques unes aussi (mais je me trompe souvent). La première, c’est que pour être innovant, il faut être forcément différent. “Ce n’est pas innovant, je l’ai déjà vu ailleurs”. Oui, mais est-ce que ça a marché ? “Non.” Ah… Être disruptif ne suffit pas. Être créatif non plus. Copier les bonnes idées peut être un acte d’innovation. Les bonnes idées ne font pas l’innovation. Les idées bien menées oui.

Le plus bel exemple d’une innovation parfaitement orchestrée est celui d’Apple. Je vous conseille de lire (que dis-je, de dévorer) l’article de Malcom Gladwell dans le dernier numéro du New Yorker sur l’innovation chez Apple.

Steve Jobs n’a pas inventé la souris

Ni même l’interface en fenêtres (“windows”, copié quelques années plus tard par Microsoft). Steve Jobs a découvert la souris et l’interface graphique dans le laboratoire de Xerox, en 1979.

En échange de parts dans sa boîte, le fondateur d’Apple, alors âgé de 24 ans, a obtenu de jeter un œil aux créations de Xerox dans son laboratoire de recherche, le Xerox PARC. C’est là qu’il a découvert l’ordinateur personnel inventé par Xerox. La démonstration était menée par Larry Tesler. L’ingénieur a saisi une “souris” avec laquelle il dirigeait un curseur sur l’écran de l’ordinateur. Mieux : au lieu de taper une commande pour piloter l’ordinateur, Tesler cliquait sur des boutons pour ouvrir des “fenêtres”… Il pouvait même envoyer des mails via le réseau interne de Xerox. Nous étions en 1979.

Très excité, Jobs marchait dans tous les sens dans la pièce, raconte Tesler. “Pourquoi ne faites vous rien avec ça ? C’est révolutionnaire !” Xerox a finalement sorti un produit en 1981, le “Star”. Mais il était trop lent et n’a jamais trouvé son public.
De retour chez Apple, Jobs a demandé à son équipe de changer de stratégie. Il voulait un ordinateur avec des fenêtres, et une souris pour le piloter ! Quelques mois plus tard naissait le premier “personal computer” à interface graphique, avec une souris : le célèbre Macintosh. On connait la suite.

Voici le “Star” de Xerox et le Macintosh :

La souris Xerox, à trois boutons (coût de fabrication : 300$ l’unité) et la souris du Mac à un bouton (coût de fabrication : 15$) :

Apple a-t-il volé l’idée de Xérox ?

Non, répond Malcom Gladwell, qui précise d’ailleurs que l’idée de la souris est sortie du cerveau d’un certain Douglas Engelbart, chercheur du Stanford Resarch Institute, à la fin des années 60. Elle était carrée et en bois, mais c’était bien une souris :

Si vous placez les trois objets à la suite, vous ne verrez pas la reproduction d’une même idée, mais plutôt l’évolution d’un concept, poursuit Gladwell.

S’inspirer et … faire mieux

Que faut-il en conclure ? Qu’avoir une bonne idée ne suffit pas. Que les idées sont dans l’air et qu’elles ne doivent pas être protégées si l’on veut continuer de nourrir l’innovation. Que reprendre les idées des autres est souvent une bonne méthode, parce que l’innovation n’a rien à voir avec l’idée originale. L’innovation est un process, souvent itératif, qui consiste à mettre en œuvre, faire des choix, tester, lancer sur le marché, se tromper.

Copier, c’est innover ? Oui et non. En fait, Jobs n’a pas cherché à reproduire ce qu’il avait vu. Il s’en est inspiré, mais surtout : il est allé beaucoup plus loin, parce qu’il voulait lancer le produit sur le marché. Il n’y a pas de limites aux sources d’inspiration. Même s’inspirer des idées des autres. C’est toute la force d’Internet aujourd’hui : favoriser la copie pour dynamiser le processus d’évolution en supprimant la phase R&D (recherche et développement) : la R&D c’est le marché.

Cette philosophie gagnante met en lumière toute l’absurdité du bac à la française : on interdit aux élèves de copier sur leurs voisins, alors qu’on devrait les encourager ! La première fois que j’ai entendu cette idée c’était en 1997, aux rencontres Internet d’Autrans. L’auteur de cette phrase était un cadre d’Apple France…

Être créatif est essentiel. Mais que faire de la créativité ? Dans créativité, il y a d’abord “création”. Faire. Comment intégrer les créatifs dans les process industriels d’une grande entreprise ? L’innovation, ce n’est pas l’originalité à tout prix. C’est d’abord un savoir-faire. Il y avait beaucoup de créatifs chez Xérox, qui avait eu la bonne idée d’offrir à ses ingénieurs un terrain de jeu avec le Xérox PARC. Mais il n’en n’est pas sorti beaucoup de projets gagnants parce que l’entreprise avait du mal à gérer ses créatifs, en d’autres terme : à piloter l’innovation.

Ah si, il y a eu l’imprimante laser. Mais lisez plutôt son histoire, relatée par Gladwell : l’inventeur de l’imprimante laser s’appelle Gary Starkweather. Quand il a commencé à travailler sur le concept, la direction de Xérox lui a répondu que ce n’était pas le business de Xérox. On lui a donc interdit de poursuivre ses recherches. Mais Starkweather s’est entêté, il a caché son travail derrière un rideau noir dans son labo ! Finalement, l’imprimante laser a été l’un des plus beaux succès de Xérox. Starkweather en était assez fier. Mais il avait beaucoup souffert également.

Il a donc quitté Xérox pour rejoindre une jeune entreprise bouillonnante : pas de laboratoire, ici. Le laboratoire, c’était l’entreprise. Le nom de la boîte ? Apple.

Initialement publié sur La Social News Room sous le titre Le cas Apple : faut-il être original pour être innovant ?

Illustration Flickr CC Raneko

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Quelle sera la première ville open source du monde ? http://owni.fr/2011/05/02/ville-open-source/ http://owni.fr/2011/05/02/ville-open-source/#comments Mon, 02 May 2011 12:47:30 +0000 aKa (Framasoft) http://owni.fr/?p=60037 Voici deux traductions pour s’interroger ensemble sur le concept de « ville open source ». Il s’agit de voir ici la ville comme une plateforme, une plaque tournante, un incubateur, bref un lieu privilégié où peuvent s’épanouir les entreprises et start-up qui placent l’open source au cœur de leur stratégie et de leur développement.

Les villes de Raleigh (USA) et Montréal (Canada) souhaitent apparemment poser leur candidature et ont, semble-t-il, de bons arguments.

Encore faudrait-il définir ce qu’est ou peut être une « ville open source », et se demander s’il est pertinent de vouloir créer, favoriser ou labelliser de telles villes.

L’un des auteurs nous propose ainsi trois critères : la volonté de partager, la volonté d’être informé, et une attitude ouverte à l’innovation, à la créativité et aux expérimentations de toutes sortes.

Et en France, me direz-vous ? Cela bouge du côté de l’Open Data (Rennes, Paris…) mais au-delà, je ne sais pas. Des avis et des liens sur la question ?

PS : Nous avions déjà évoqué la chose dans un billet sur une autre ville canadienne Vancouver : S’il te plaît… dessine-moi une ville libre.

1. Raleigh, Caroline du nord – la première ville open source au monde

Raleigh, NC—the world’s first open source city

Jason Hibbets – 21 février 2011 – OpenSource.com
(Traduction Framalang : Khyl, Naar, Cheval boiteux et Goofy)

J’ai commencé à méditer sur les qualités qui devaient définir une ville open source il y a quelques mois, quand mon ami Tom Rabon m’en a fait mention au détour d’une conversation. J’étais curieux de voir de quelle façon la ville dans laquelle j’habite, Raleigh, en Caroline du Nord, pouvait attirer d’autres entreprises open source et en être un incubateur mondial, pour en devenir un exemple phare de gouvernance. Comment Raleigh pouvait-elle devenir la capitale du monde de l’open source, à l’instar de ce que sont la Silicon Valley pour la technologie et Paris pour la romance ?

Je pense que la réponse peut être trouvée à la fois par le gouvernement et par la population. D’abord, nos dirigeants doivent être partants pour adopter l’open source au quotidien. Ils doivent faire preuve de transparence dans leur gestion des affaires et dans l’encouragement à la participation citoyenne. Les citoyens, quant à eux, doivent être prêts à participer et à contribuer en donnant de leur temps et de leurs connaissances. Les deux ont besoin d’adopter un prototypage rapide pour explorer de nouvelles idées et des solutions innovantes.

Mais en quoi Raleigh se distingue-t-elle des autres villes ? En quoi est-elle plus apte à être une ville open source que New York, San Francisco, Londres, Paris ou Pékin ? J’ai rencontré autour d’une table le maire de Raleigh, Charles Meeker, pour discuter de ce qui faisait qu’une ville pouvait devenir open source.

Le maire Meeker a été élu en 2001 et s’est familiarisé avec l’open source, principalement en s’intéressant à Red Hat et au modèle de développement open source. En tant qu’avocat, il n’est pas étonnant que le maire Meeker comprenne les avantages de la collaboration et du partage des connaissances. Voyons pourquoi la ville de Raleigh est prête à revendiquer son titre de première ville open source au monde.

Quel grand chantier, en dehors de la technologie, a la meilleure chance d’être abordé par la voie open source (c’est-à-dire au moyen de la collaboration, de la transparence, du partage, de la méritocratie, du prototypage rapide, d’une communauté, etc.) ?

Dans une zone de la ville de Raleigh, l’accent a été mis sur l’utilisation d’un éclairage plus éco-énergétique dont nous pouvons mesurer les résultats. Nous nous activons à la promotion et au partage de nos expériences avec les autres municipalités, notamment pour tester notre consommation d’électricité et la qualité de la lumière produite. Le partage de cette information est un élément majeur de notre expérience.

La ville de Raleigh dispose de quarante installations en LED avec une économie moyenne de 200 000 €/an sur les coûts en électricité. Le retour sur investissement est généralement de l’ordre de 3 à 5 ans (en considérant les coûts du capital). C’est une excellente option pour les parkings éloignés. Vous pouvez facilement installer quelques panneaux solaires et ne pas avoir à ajouter de nouvelles lignes ou changer d’infrastructure. La possibilité pour les villes du monde entier d’adopter l’éclairage éco-énergétique est une véritable chance qui s’offre à elles. La ville de Raleigh veut prendre part à l’aventure et être reconnue comme précurseur dans l’adoption de cette technologie. Propager la bonne parole sur l’éclairage par LED avec l’aide de notre partenaire, Cree, est important pour nous.

Quelles sont vos réflexions à propos d’un gouvernement ouvert ou gouv’ 2.0 et que peut faire la ville de Raleigh pour avoir un gouvernement plus ouvert et transparent vis-à-vis de ses citoyens ?

Tout d’abord, toutes nos réunions sont ouvertes au public, à quelques exceptions près. Le véritable défi est de savoir profiter de l’expertise de chacun de nos citoyens. Il y a beaucoup de compétences de haut niveau qui peuvent servir à résoudre les vrais problèmes de la ville.

Une solution se situe au niveau des nouveaux comités, comme le nouveau comité ferroviaire que nous avons mis en place, et la façon dont leurs conseils et leurs recommandations sont pris en compte par la ville. Les questions autour des frais de gestion des eaux pluviales nous ont conduits à puiser dans l’expertise de nos citoyens pour apporter les meilleures solutions.

Le ferroviaire est un domaine qui sera opérationnel pour les 3 ou 4 prochaines années. Nous avons beaucoup de personnes expérimentées dans ce domaine prêtes à partager leur savoir et à mettre en application leurs connaissances pour aider à prendre les futures décisions.

Montrer au public ce que nous faisons et expliquer les bonnes pratiques sont des atouts qui restent sous-utilisés, mais nous avons eu du succès, notamment quand le comité de gestion des eaux pluviales a fait part de son avis sur la façon de mieux gérer les inondations. Le conseil municipal a ainsi été en mesure de mettre à profit l’expertise du comité pour prendre les meilleures mesures politiques à ce sujet.

Quelles sont les qualités requises pour devenir une ville open source ?

Trois critères me viennent à l’esprit :

  • la volonté de partager ;
  • la volonté d’être informé ;
  • une attitude ouverte à l’innovation, à la créativité et aux expérimentations de toutes sortes.

Les citoyens doivent se tenir prêts à adopter le futur. L’open source est une stratégie que nous appliquons pour aller de l’avant.

Pourquoi Raleigh s’est amorcée à devenir la première ville open source au monde ?

Nos citoyens sont prêts faire avancer Raleigh et à être plus concentrés sur la démarche open source. Raleigh est disposée à devenir son incubateur mondial.

L’avantage de Raleigh se situe au niveau de sa croissance et des emplois. Nous aimerions voir le Centre des congrès accueillir plus de conférences sur l’open source. Nous serions honorés de voir un tas de petits Chapeaux Rouges (NdT : référence faite à la distribution GNU/Linux Red Hat), et que des start-up et sociétés bien établies viennent dans notre région parce que nous avons fait le choix de ce modèle de développement.

Les partenaires sont aussi une grande partie de la réponse. Le Centre des congrès, le Syndicat d’Initiative, la Chambre du Commerce et les autres partenaires doivent adopter l’open source et le mettre en évidence dans le cadre de notre stratégie de développement économique.

Comment mettre en œuvre la démarche open source dans votre vie quotidienne ?

Au cabinet juridique pour lequel je travaille, j’ai essayé de fournir des informations à de jeunes avocats. Une sorte de partage des secrets commerciaux pour les aider à réussir plus rapidement, et, pour être franc, l’une des choses les plus difficiles pour toute personne de la fonction publique, c’est l’écoute. J’ai remarqué que l’écoute représente 70 à 80 % du travail. Vous devez pleinement comprendre ce qu’il se passe pour prendre la décision adéquate.

2. Montréal peut-il devenir un incubateur de start-up open source ?

Can Montreal Become an Open Source Startup Hub?

Evan Prodromou – 21 février 2011 – NextMontreal.com
(Traduction Framalang : Khyl, Naar, Cheval boiteux et Goofy)

« Le premier prix est une Cadillac El Dorado. Le deuxième prix est un lot de couteaux à viande. Le troisième prix est votre licenciement. » – Blake, Glengarry Glen Ross

Seth Godin indique, dans son fabuleux ouvrage The Dip [en] (NdT : Un petit livre qui vous enseignera quand renoncer et quand persévérer), que la seule position qui compte dans les affaires, c’est la première. Quand les lois du pouvoir et les effets de réseau sont nécessaires, la première place du classement est la seule où il faut être. Vous devrez être « le meilleur du monde » dans quelque chose, ou bien vous feriez mieux de laisser tomber et de faire autre chose.

Les écosystèmes technologiques – la plupart des marchés d’affaires, en fait – ont des effets de réseau, et cela veut dire que la seule position à avoir, en tant qu’écosystème, est la première. Être le meilleur au monde.

Quelle est la zone la mieux classée au monde dans les start-up du Web ? La baie de San Francisco. Quelle est la deuxième ? Probablement New-York City. Qui a le troisième prix ? Qui s’en soucie ? Le troisième prix, c’est votre licenciement.

Si nous nous soucions de la croissance de notre écosystème local, peut-être que nous aurions besoin d’arrêter notre course à la 14ème ou la 29ème place du classement dans le monde des start-up orientées Web et réfléchir à construire quelque chose d’autre. Un domaine dans lequel nous serions les meilleurs et sur lequel personne d’autre n’a encore vraiment travaillé. Là où nous pourrions être les meilleurs au monde – pas les 14ème, pour ensuite laisser tomber.

Montréal a la capacité d’offrir le meilleur écosystème au monde pour les start-ups centrées sur le développement de logiciels open source. Nous fournissons un bon cadre pour les entrepreneurs qui ont de l’expérience dans la mise en place d’entreprises tournées vers ce secteur économique, nous avons des investisseurs qui ont bien compris le processus d’investissement et d’encouragement de ce type de compagnies et nous avons un très précieux vivier de talents qui ont contribué à cette évolution.

Plus important, il n’y a aucune autre ville autant tournée vers l’open source sur le globe. San Francisco et Boston accueillent quelques sociétés, mais ne sont absolument pas des incubateurs. Le paysage commercial de l’open source se propage beaucoup plus à travers le monde, de Londres à l’Utah en passant par l’Allemagne et Austin.

Plus que tout, c’est sa commercialisation qui est difficile. Demandez à n’importe quelle personne impliquée dans une entreprise open source. La difficulté se trouve dans l’élaboration d’un modèle de travail. Il n’y a pas de solution simple. Les techniques des start-up pour les autres types d’affaires, tels que l’investissement et les stratégies de commercialisation, ne semblent pas s’appliquer aussi bien. Cela signifie qu’il existe un obstacle à l’entrée d’autres écosystèmes, dont un que nous pouvons exploiter.

En ce moment, j’ai connaissance d’au moins cinq start-up open source dans la ville :

  • StatusNet [en] – J’ai lancé cette entreprise ici-même en 2008. Nous avons levé 2,3 millions de dollars de fonds à Montréal et New-York. Nous enregistrons environ 5 000 téléchargements par mois et dénombrons 45 000 sites fonctionnant sur notre SaaS. Nous comptons actuellement 9 salariés à Montréal et San Fransisco (NdT : StatusNet est un logiciel libre de microblogging sur lequel repose Identi.ca).
  • Vanilla Forums [en] – Le meilleur système de gestion de forums au monde. Il tourne sur plusieurs centaines de milliers de sites et inclut un service SaaS de haute performance.
  • Bookoven [en] – Cette plateforme sociale de publication s’est tournée vers un modèle de logiciel open source. Dirigée par Hugh McGuire, créateur de Librivox, le très populaire projet de livre audio à contenus ouverts.
  • Stella [en] – Cette société à forte croissance a rendu [en] ses logiciels open source.
  • Subgraph [en] – Startup orientée sur la sécurité développant Vega, logiciel open source d’évaluation des vulnérabilités.

Au rang des investisseurs, deux des plus importants groupes financiers de la ville (iNovia Capital [en] et Real Ventures [en]) tentent l’expérience des start-ups open source. Real Ventures (ou plutôt son prédécesseur, MSU [en]) a déjà investi dans trois entreprises open source locales.

En ce qui concerne le potentiel des employés talentueux… c’est plus difficile. Il y a beaucoup de techniciens compétents dans la ville, et les sociétés open source qui en sont en dehors, comme Canonical [en] ont des équipes techniques locales qui peuvent suivre le bassin des start-up de talent. Quid du personnel d’entreprise talentueux ayant une expérience open source ? Ils sont rares sur le terrain. Heureusement, les gens qui ont travaillé dans les sociétés mentionnées plus haut constituent aussi un bon noyau de ce bassin.

Je crois que les conditions sont réunies pour que Montréal prenne sa place dans le monde des technologies en tant qu’incubateur de start-up open source. La semaine prochaine, je dévoilerai ce que je pense être un projet potentiel pour que Montréal devienne le fer de lance de ce marché.

Billet initialement publié sur Framablog

Images Flickr CC PaternitéPas de modification billaday PaternitéPartage selon les Conditions Initiales opensourceway et PaternitéPas d'utilisation commercialePas de modification pt

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http://owni.fr/2011/05/02/ville-open-source/feed/ 21
[edito] France: round b fever! http://owni.fr/2011/03/31/edito-france-round-b-fever/ http://owni.fr/2011/03/31/edito-france-round-b-fever/#comments Thu, 31 Mar 2011 06:36:34 +0000 Nicolas Voisin http://owni.fr/?p=54329 NDA : ceci est un édito « Jean-Claude Vandamme compatible ». Il mélange allègrement les langues, car il tente un mix des cultures qui exige un minima de gymnastique linguistique ;-)

Légende

Sustainability : rentabilité ou profitabilité, au sens d’un modèle économique qui permet l’équilibre et tend à le rendre durable. Le modèle fondamental d’une économie traditionnelle.

Scalability : aptitude d’un produit ou d’un modèle économique à devenir exponentiel en terme de marges générées. Souvent similaire d’absence de modèle de revenus au départ et de pertes durables, il est une norme dans le numérique (ex : logiciels et services à coûts fixes voire faible et marché considérable)

VC : Venture Capitalists, les grands frères des Business Angels, c’est à dire les représentants des fonds d’investissements, ici dans leur acception américaine.

Round : tour de table, au sens d’une ouverture de capital à des investisseurs. Dans le langage courant on parle de levée de fonds, en général synonyme d’une augmentation de capital par émission d’actions nouvelles souscrits par des investisseurs aptes à capitaliser une société.

PME : « une société qu’il faut aider » (Benjamin Bertrand, Philippe Bodénez et Etienne Hans [PDF] ;-)

Simplexification : Google et Wikipedia [en] sont vos amis!

La « sustainability » a un prix

Racontez à un VC, américain par exemple, que votre société est rentable. Il comprendra “je ne vais pas faire de big deal”. Racontez lui comment vous êtes rentables – en étant innovant, en expérimentant, en testant des marchés et des modèles économiques que n’ont pas investi vos concurrents – ici la vente de contenants, c’est à dire des sites, webapp, du datajournalism et autre lignes de codes open-source – et il vous répondra “je n’ai rien compris. c’est trop complexe”.

C’est, en creux, une partie de ce que nous avons compris à SxSW, où nous étions en finale. Les VC d’Austin n’investissent pas en Californie. Et ceux de San Francisco rarement à Palo Alto. Ils investissent de plus en plus « à 10 miles ». Pour passer au petit dej. La « scalability » est leur unique grille de lecture. Et ils avancent et « montent » à bord round après round. Nous étions en finale de l’un des principaux accélérateurs au monde dans notre écosystème news + technology (« news technology related » gagné par Storify, où nous étions la seule société non américaine finaliste) et nous avions bien l’intention d’en profiter pour tester notre discours avec les ” VC US”.

Fessée cul-nul et leçon de vie

Nous sommes européens. « Sustainable » et fiers de l’être. Ils sont américains. « Scalable » au prix de “fail quickly”… Et bornés à le demeurer. C’est ainsi que l’on finance des Google, Twitter, Facebook ou… Quora. Et une bulle de naître ces jours-ci! Une bulle faite de développeurs sans marketeux, d’algorithmes sociaux sans contenus à valeur ajoutée, une bulle de jeux, de « persocialisation » et d’hyperlocal géo-augmenté, enfin une bulle, plein de buzz-words et autres killer concepts à base d’apps – jamais universelles :)

Cette spécificité est vertueuse!

Une philosophie de la vertue créatrice ? La spécificité du marché européen, caractéristique des entreprises et PME françaises – la recherche absolue de « sustainabilité », d’équilibre – lié à la difficulté à se financer par la dette, bancaire, et à l’étroitesse extraordinaire du maillage financier de l’innovation – qui plus est dans le numérique et de manière caricaturale dans les contenus web – cette spécificité n’est pas seulement une faiblesse. Ce modèle est aussi vertueux. Il permet les réglages, les faux départs, la construction par agrégation de talents, l’innovation contrainte, par les moyens, par la quête de la rationalité. On fait pire accompagnement de “start-up”.

Mais ce modèle a besoin d’investisseurs qui interviennent une fois le modèle démontré ! Ce n’est pas le cas du modèle français, riche de “business angels” de “round a” (de premier tour de table à des valeurs minimalistes) mais extraordinairement pauvre de fonds et d’acteurs industriels de “round b” c’est à dire montant au capital après démonstration du modèle économique (en année 2 ou 3 en rythme normal) pour soutenir la quête de « scalabilité », de gains de marges à potentiel exponentiel quand il s’agit du numérique. En « round c », pas de soucis, vous pouvez dialoguer avec des investisseurs à plus de 10 miles. Ça tombe bien, car il n’y a pas d’acteur véritablement innovant (et couillu !) de « round c » en France non plus.

Le modèle européen a besoin de ses VC !

La « scalabilité » et le « focus » sont à ce prix

Si vous voulez rendre « scalable » votre activité, encore faut il en avoir testé les diverses facettes et les opportunités comme les effets de bords de certains arbitrages. Être focus est le temps 1 en économie de type américaine. C’est le temps 2 en économie de type européenne. Préjuger de la valeur de l’un des modèles sur l’autre serait souvent se tromper. Et paradoxalement laisser trop peu de chance à l’erreur constructive (nous tirons plus d’enseignements de nos erreurs que de nos justes intuitions ;)

« Scalability » is a « simplexification » process

Il ne parait pas aberrant de devoir passer par une alchimie économique complexe, expérimentale, qui a besoin d’être « sustainable » afin d’identifier de façon agile ses opportunités de croissance. C’est ce processus de simplification, de reconcentration sur son cœur d’activité, de spécificité et de valeur ajoutée, qui passe par une étape initiale complexe qu’exige le modèle français. Revendiquons-le !

Pour être « focus », d’abord être expérimental!

Tout est dans le titre. Le modèle US qui sait financer l’innovation et la « scalabilité » ne sait pas offrir de chance à des expérimentations qui dépassent les seules entreprises qui les mènent et peuvent bouleverser leur paysage, leur écosystème, positivement. A l’inverse cette économie casino (?) sait créer des Napsters qui agissent tels de puissants tsunamis. Combien de Napsers pour des milliers d’OWNI ? Combien d’expérimentations qui puissent être ET d’intérêt public ET « sustainaible » (être rentable est déjà rare dans notre paysage !) ET « scalable » à terme (le vrai défi pour “l’information augmentée”) ?

Pour être « scalable », d’abord comprendre où sont les FBI

La FBI c’est la « Faculté Brute d’Investissement », expression inventée à la soucoupe, mêlant actif comptable et marge d’exploitation réelle, qui mesure l’aptitude, brute, comme son nom l’indique – c’est à dire avant arbitrages stratégiques – à financer de l’innovation de façon endémique. Avant de tenter de décliner et de proposer en B to C une offre, je pense sincèrement que l’élaborer de façon transversale et didactique avec une cible fortement B to B n’est pas le pire des chemins. La preuve s’il en fallait une : nous sommes encore là. Et vous aussi !

Pour être d’intérêt public, d’abord être indépendant ;-)

Je vais finir par mon point #anarnaute, l’édito du mensuel étant le seul lieu de cet exercice cathartique, en re-précisant ce qu’est un éditeur de presse (“celui qui prend soin” d’après la définition du dictionnaire de l’académie française, de 1762) au sens fondamental de cette expression à connotation juridique : un éditeur de presse est une entreprise bicéphale qui associe des talents en deux pôles, l’un est une rédaction qui dans le meilleur des cas se pose des questions d’intérêt public, et l’autre une société profitable, qui dans le meilleurs des cas tire son indépendance de cette profitabilité. Tout est ici résumé. L’indépendance est garantie par cette « bicéphalité ».

Un projet de média qui serait seulement « scalable » serait « VC compatible », mais est-il alors gage d’indépendance ? Je crois foncièrement le contraire – comprenez : je crois que le contraire est davantage gage d’indépendance. Non pas la pauvreté, mais la recherche de l’équilibre lors de la phase de constitution. Deux mois parfois. Près de 3 ans dans notre cas. Cinq ans en comptant “les années blogs” et 1 an et demi en ne regardant notre histoire que depuis la naissance de la seule soucoupe OWNI.

OWNI’s growing

On a appris à SxSW. Appris notamment à répondre à cette question : « comment t’es scalable ? ». Une réponse à base de livres électroniques (des ebooks et notamment des ebooks augmentés) et d’apps, de webapps universelles – question de religion – mais d’apps iPad aussi, de Push encore, de “niquer Murdoch” enfin – par pragmatisme il paraît. On a appris qu’il ne fallait pas tenter de cloner OWNI.fr aux Etats-Unis mais qu’il nous fallait tenter de conquérir de nouveaux territoires, avec de nouvelles cartes, et un modèle dédié à ce western.

Simplexifier

Nous allons réaliser outre-atlantique une/la killer app ipad de datajournalism que nul n’a encore délivrée, le seul média conçu pour l’iPad qui embarque des contenus réellement augmentés…

… Et non des photos du chien le plus riche au monde – paix à ton âme, Rupper :)

De SxSW à Marie Christine

Cet article est dédié à Marie-Christine, qui se reconnaîtra, et qui avant les Texans nous avait posé les bonnes questions. Mais le contexte est roi. Cet article est aussi dédié à Xavier, qui a gagné au Texas et passé sa nuit à faire autre chose que de boire. Le modèle français en fut troublé – et le contexte empereur :-)

Cet édito est également dédié à Google, Wired, Actuel, et à Pierre, entre autres !

Dans les semaines qui viennent OWNI souhaite boucler sa seconde levée de fonds, son “round b”. Dans les mois qui suivent nous ouvrirons le « round a » de notre première filiale, américaine. Comme à chaque étape de nos joies et de nos batailles, nous vous tiendrons informés de ce que nous apprenons, en marchant. Non sans passion!

Retrouvez:

- l’article contant notre première aventure américaine (et le prix d’excellence générale en journalisme online, à l’ONA – Washington)

- Tous les éditos de la Soucoupe

- SxSW sur OWNI

Extrait du document de présentation de la stratégie d’OWNI (France – USA – 2011) / CC 22Mars SAS.

Illustrations CC FlickR par alykat, Visualist Images, • ian

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http://owni.fr/2011/03/31/edito-france-round-b-fever/feed/ 5
Faut-il vraiment réindustrialiser la France ? http://owni.fr/2011/02/27/economie-reindustrialisation-service/ http://owni.fr/2011/02/27/economie-reindustrialisation-service/#comments Sun, 27 Feb 2011 09:30:30 +0000 Henri Verdier http://owni.fr/?p=48290 C’est peu de dire que le discours sur la désindustrialisation de la France est aujourd’hui dominant. Et cette fausse évidence appelle donc en riposte un discours symétrique sur la nécessaire réindustrialisation.

Quel rapport avec ce blog plutôt consacré à la transformation numérique ? A l’innovation, aux changements de société, à la nouvelle économie, au web et à ses évolutions ultra-rapides ?

Eh bien, je crois que le rapport est très étroit.

La compétition numérique en cours est constituée d’une série de batailles, parfois très rapides. Bataille des télécommunications, bataille des contenus, bataille des données, bataille des services, etc. Ces compétitions sont des compétitions globales, de politiques industrielles, dont les nouveaux géants ne sont qu’une partie émergée. L’excellence française dans ces compétitions est donc étroitement corrélée à la vision nationale de ce qu’est la puissance économique. Si l’on se tourne excessivement vers les recettes passées, si on construit une politique industrielle et économique sur des schémas datés, si l’on sépare, voire si l’on oppose, artificiellement, les différentes manières de créer de la valeur, il est peu probable que nous saurons revenir en tête du peloton des pays les plus innovants et les plus compétitifs.

Pour les entreprises réellement innovantes, souvent fondées sur les technologies numériques, qui recherchent la “scalabilité”, l’hypercroissance, de nouveaux usages, de nouvelles valeurs d’usage, une organisation dynamique de l’innovation, fondée en particulier sur l’agnosticisme technologique, ce débat est donc un véritable chausse-trape.

Bref, si l’on s’obstine à penser le numérique comme une filière industrielle, on renoncera aussi bien à Avatar qu’à Google, Foursquare ou Quora et on se mettra tout seuls sur la touche pendant que d’autres feront la révolution de civilisation qu’est la Révolution numérique.

Nous ne voulons pas choisir entre un cartel d’industries matures et une alliance avec les emplois à domicile. Nous avons besoin d’une nouvelle alliance, dans l’esprit de ce que j’évoquais dans mon billet sur la filière de l’innovation, et dans l’esprit du projet de l’Institut de recherche technologique que nous avons connu.

C’est pourquoi, au milieu de ce climat un peu néo-luddiste, j’ai été très agréablement surpris de recevoir au bureau un exemplaire de La Gazette de la société et des techniques, c’est-à-dire des Annales de l’École des Mines, intitulé “Industries et services, une notion dépassée ?”

Ce document, publié en novembre dernier, synthétise lui-même le mémoire de fin d’études de deux ingénieurs des Mines, Eric Hubert et François Hennion, paru au cours de l’été sous le titre initial : “Mesurer les services : qu’est-ce que la puissance économique ?” [pdf]

La lecture de ce mémoire est extrêmement stimulante.

Vers une convergence de l’économie des services et de l’industrie ?

On y apprend d’abord que la catégorie un peu fourre-tout de “services”, qui regroupe par exemple recherche, télécoms, gardiennage, nettoyage, location, juridique, comptabilité, architecture, immobilier, finance, livres, cinéma, e-Education nationale, médecine, hôpitaux… représente aujourd’hui près de 80 % du PIB -mais surtout porte la croissance du PIB-, de la consommation des ménages et plus encore de l’emploi.

On y apprend aussi que le prétendu déclin de l’industrie est en grande part une illusion d’optique. Il se fonde tout d’abord le plus souvent sur la part de l’industrie dans le PIB, et celle-ci régresse en majorité du fait de la progression des industries de services, comme l’agriculture avant elle. Labourage, pâturage et industries ne sont plus les seules mamelles de la France, c’est ainsi. Il se fonde également sur une mauvaise analyse des gains de productivité de l’industrie, qui explique sa faible contribution à la création nette d’emplois. Mais surtout, il se fonde sur une mauvaise analyse des évolutions en cours dans le tissu industriel. Car l’organisation méthodique de la sous-traitance, qui prend le plus souvent la forme de services aux entreprises, fait apparaître comme emplois de services des emplois qui étaient jusque là comptabilisés dans l’industrie. Ainsi, disent les auteurs, si le secteur industriel ne pèse plus que 20 % des emplois en France, la production de produits industriels est responsable de plus de 50 % des emplois.

Mais surtout, les deux jeunes auteurs condamnent avec aplomb une distinction qu’ils jugent désormais obsolète. Que valent les services qui ne s’appuient pas sur des biens matériels ? Fort peu. Que valent les produits qui ne sont pas appuyés sur une chaîne logistique, une commercialisation efficace, un service après-vente ? Presque rien. La valeur d’usage est toujours un service rendu à l’utilisateur, qui conjugue intimement biens et service.

Une fois reconnue cette indissociabilité des biens et des services, nos auteurs proposent de se concentrer sur la compétitivité, et suggèrent toute une série de mesures administratives : utiliser la fiscalité – y compris la subvention – pour pousser les entreprises à produire les données dont on a besoin pour mesurer la nouvelle économie, repenser la typologie des organisations en fonction de leur dynamique de gains de productivité, travailler à la création de marchés nouveaux grâce à la standardisation, faire évoluer les aides à l’innovation pour ne plus les limiter exclusivement à la recherche…

Ces conclusions restent sans doute encore un peu “administratives”, mais il est quand même rassurant de voir nos futurs hauts fonctionnaires sortir de distinctions qui pénalisent notre économie. Car sans cela, nous allons rater toutes les grandes révolutions qui pointent à l’horizon : villes intelligentes, robotique de service, greentech, etc., qui seraient bien en peine de dire si elles penchent plutôt du côté de l’industrie ou des services…


Article initialement publié sur le blog de Henri Verdier.

Illustrations CC FlickR: RevolWeb ; Peter Durand

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http://owni.fr/2011/02/27/economie-reindustrialisation-service/feed/ 15
La SNCF et l’écologie: essai en cours de transformation http://owni.fr/2011/02/15/la-sncf-et-lecologie-essai-en-cours-de-transformation/ http://owni.fr/2011/02/15/la-sncf-et-lecologie-essai-en-cours-de-transformation/#comments Tue, 15 Feb 2011 16:37:19 +0000 Ludovic Bu http://owni.fr/?p=38036 Lors de mes conférences, je cite régulièrement la SNCF comme le meilleur exemple d’une entreprise ayant pour stratégie une intégration horizontale de l’ensemble de la chaîne de mobilité. La compagnie de transports française a, en effet, parfaitement compris le fait qu’un voyageur souhaite qu’on le prenne en charge depuis son point de départ et jusqu’à son point d’arrivée, et non uniquement sur des tronçons de trajets (par exemple d’une gare à une autre). Challenge que seule la voiture individuelle en possession propre réussissait à relever jusqu’à présent, en étant présente dans votre garage et vous amenant jusqu’au parking de votre lieu de destination (voire vous permettant de ne pas avoir à sortir de votre auto en utilisant des services de “drive thru”).

Quand une entreprise publique agit pour l’environnement

Dans cette logique, la SNCF a totalement intégré Keolis (transports en commun locaux, un peu d’auto-partage) et Effia (stationnement, principalement à l’abord des gares, services de vélos, etc). Elle a également lancé le fond d’investissement “éco-mobilité”, doté de 15 millions d’euros, pour entrer dans des start-ups offrant des services permettant de compléter cette chaîne de mobilité. Lors de sa conférence annuelle “rencontres clients”, j’ai découvert qu’elle allait beaucoup plus loin dans sa mise en oeuvre de principes et d’actions en faveur de déplacements moins impactants écologiquement.

Pourtant, de prime abord, je ne m’attendais pas que ce gros paquebot industriel soit à la pointe de l’innovation dans ce domaine. A la fois parce qu’il est toujours difficile de manoeuvrer un tel navire. Qui plus est pour le transformer d’une entreprise de cheminots qui font rouler des trains en une entreprise multi-services orientée voyageurs. A la fois parce que le discours simplifié de la SNCF consiste à expliquer que prendre le train est un acte écolo, car cela pollue moins qu’un même trajet effectué en voiture ou en avion, sans jamais remettre en question l’utilité même des multiples causes de déplacements. Enfin, parce que l’image communément associée à l’entreprise est moins celle d’une entreprise innovante que celle d’une compagnie publique toujours au bord du déficit et à deux doigts de la grève paralysante pour notre pays (image très caricaturale, d’ailleurs, car les jours de grèves ne sont pas si nombreux, mais ils sont très visibles).

Eh bien, lors de la rencontre client 2011, j’ai mangé mon chapeau, et j’ai découvert une entreprise à la pointe dans le secteur. Les initiatives sont lancées tous azimuts, et cela ne semble être qu’un début. Parmi la multiplicité des projets présentés, mon attention a particulièrement été attirée par le projet de gare HQE de Besançon, le nouveau service de mobilité totale à Pau et la transcription audio des affichages visuels à Nancy.

Réjouissances pour les voyageurs dès décembre 2011

La gare HQE ouvrira au public en décembre 2011. Ce sera la première gare en Europe labellisée Haute Qualité Environnementale. Elle sera notamment chauffée au bois et en partie enterrée, ce qui lui permettra d’avoir toujours naturellement au moins une température de 10°. Quant au second projet, la principale innovation est que, désormais, les Palois peuvent utiliser des services de transports en commun, d’autopartage et de location de vélo avec une seule carte et une seule tarification, assurant ainsi une facilité d’usage bien nécessaire pour imposer des modes alternatifs à la voiture individuelle.
Enfin, à Nancy, 120 mal et non voyants peuvent désormais entendre ce qui est affiché sur les panneaux de la gare, en temps réel ! Ce service est également disponible à Amiens et Orléans, et est en cours d’installation à la Gare de l’Est. Outre l’autonomie qu’il procure à ses utilisateurs, pour une fois pas obligés de demander à quelqu’un de leur lire ce qu’ils ne voient pas, j’y vois aussi un début de réponse pour aider tous ceux qui ont des difficultés avec la lecture, et pour qui il est handicapant pour se déplacer.

Mais, si ces trois projets ont retenu mon attention en particulier, il faut que j’ajoute qu’ils s’inscrivent dans un impressionnant ensemble de nouveautés ! Jugez-en vous même : carte interactive vélo + TER en Bretagne, Tram-train à Mulhouse, 25 tonnes de paniers fraîcheurs livrés chaque jour dans 80 gares (uniquement avec des produits de saison et de la région), expérimentation d’une locomotive hybride en vue d’une industrialisation, diminution de 7% des émissions carbones provoquées par la restauration à bord des Thalys (soit 2% de l’empreinte carbone totale de ce train), lancement de la V2 de l’éco-comparateur, création de pas@pas, une plateforme partagée d’achats responsables ou encore lancement de CO2Go, un éco-comparateur individuel en temps réel.

Seul petit bémol, la promotion du covoiturage pour aller dans les gares d’Ile de France, qui a tout de la fausse bonne idée dans son organisation actuelle. En effet, le système, basé sur un site web de mise en relation entre voyageurs, est présenté comme permettant de diminuer le nombre de voitures se rendant dans les gares tous les jours, et donc de la place nécessaire pour les parkings, alors que c’est plutôt la diminution du nombre de parkings aux abords des gares et la réservation des places disponibles aux seuls covoitureurs qui permettra l’augmentation de la pratique. D’ailleurs, aucun chiffre n’a été présenté pour appuyer la démonstration des orateurs, ce qui laisse penser qu’il n’y en a pas…

Mais c’est un bien petit bémol comparativement à tous les points abordés à l’occasion de cette rencontre. D’autant qu’au cours de la séance des questions / réponses, la langue de bois usuellement pratiquée par d’autres dans ce type de circonstances avait été remisée au placard, les principaux dirigeants de la société acceptant la remise en question (notamment du tout vitesse) et répondant parfaitement à mes interrogations. C’est aussi pourquoi, et au vu de cet immense ensemble d’initiatives, j’ai le plaisir de reconnaître que la SNCF est en passe de réussir son pari de devenir l’acteur majeur et incontournable de l’éco-mobilité ! A condition de déployer largement toutes ces bonnes initiatives dans l’ensemble des gares et trains de la compagnie, bien sûr.

Publié initialement sur Le blog de Ludovic Bu sous le titre SNCF: naissance d’un acteur majeur de l’éco-mobilité

Illustrations Flickr CC Mhliaw et Mgrenner

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http://owni.fr/2011/02/15/la-sncf-et-lecologie-essai-en-cours-de-transformation/feed/ 6
CES 2011 : le rapport complet d’Olivier Ezratty http://owni.fr/2011/01/24/ces-2011-le-rapport-complet-dolivier-ezratty/ http://owni.fr/2011/01/24/ces-2011-le-rapport-complet-dolivier-ezratty/#comments Mon, 24 Jan 2011 15:30:25 +0000 Olivier Ezratty http://owni.fr/?p=43602 Le Consu­mer Elec­tro­nics Show s’est achevé le dimanche 9 jan­vier 2011. Avant de lire mon rap­port CES exhaus­tif de 240 pages disponible en bas de cet article, voici un pre­mier aperçu de cette visite.

C’était un peu le salon de la reprise. Le nombre de visi­teurs aurait atteint envi­ron 140.000 per­sonnes, alors qu’il était des­cendu à moins de 110.000 en 2008, puis remon­tait len­te­ment la pente depuis. Cela se voyait dans les allées, dans les confé­rences de presse, et même dans le tra­fic rou­tier très conges­tionné de Las Vegas. Le salon est plein d’innovations mais, comme d’habitude, on n’y découvre pas d’innovations de rup­ture. L’innovation est un pro­ces­sus gra­duel, per­ma­nent. Avec des sou­bre­sauts, des phé­no­mènes d’expansion ou de reflux. C’est un peu ce que l’on pou­vait obser­ver au CES cette année concer­nant la 3D, les télé­vi­sions connec­tées, les inter­faces uti­li­sa­teurs, tout comme avec les tablettes et mobiles. La para­doxe du “rien de vrai­ment nou­veau” cou­plé à “plein de nouveautés” !

La 3D

La vidéo 3D était mise en valeur par l’ensemble des construc­teurs qui veulent pous­ser très proac­ti­ve­ment leurs nou­velles offres asso­ciées auprès des consom­ma­teurs. Cela concerne évidem­ment les écrans, mais aussi les sources (lec­teurs Blu-ray, set-top-boxes) tout comme les moyens de cap­ture qui se mul­ti­plient pour le grand public avec de nom­breuses camé­ras (Sony, Pana­so­nic, JVC, etc.) et quelques appa­reils photo qui fonc­tionnent en 3D (notam­ment chez Sony).

Du côté de l’affichage, le débat fait rage sur les mérites res­pec­tifs des lunettes actives et pas­sives, j’y revien­drai dans le rap­port. On trouve des solu­tions d’affichage sans lunettes dites “auto sté­réo­sco­piques” mais elles sont tou­jours très moyennes. Il faut dire que c’est un pro­blème tech­nique assez dif­fi­cile – voire impos­sible – à résoudre. On se console donc avec des lunettes 3D sty­lées que l’on peut trou­ver chez Sam­sung, LG Elec­tro­nics, tout comme chez une myriade de socié­tés plus spé­cia­li­sées, dont, sur­prise, Pola­roid qui en lan­çait une paire conçue par Lady Gaga, venue sur leur stand et atti­rant une foule considérable.

Télé­vi­sions connectées

La grande nou­velle du CES 2011, c’est que Google TV n’est plus l’épouvantail de l’industrie qu’il incar­nait depuis son lan­ce­ment en avril 2010. Tout du moins, pour l’instant. À la fois parce que qua­si­ment aucune solu­tion nou­velle le met­tant en œuvre n’était annon­cée (à part Sam­sung qui pré­sen­tait en cati­mini un boi­tier “over the top” et un lec­teur Blu-ray sous Google TV), Google ayant demandé à ses par­te­naires construc­teurs de repous­ser leurs annonces. Mais aussi parce que la solu­tion est pour l’instant assez déce­vante à l’usage, tout du moins lorsque l’on sou­haite consom­mer de la télé­vi­sion “à l’ancienne” et pas juste sur You­Tube. J’ai pu le consta­ter chez Sony, Logi­tech et Dish Net­work, les trois stands où Google TV était exploitable.

En consé­quence de quoi, on pou­vait obser­ver les TV connec­tées qui conti­nuent de s‘améliorer “en silo” chez les grands et petits construc­teurs, comme chez LG Elec­tro­nics dont la LG SmartTV semble être une des plus abou­ties de ces solu­tions (ci-dessous).

J’ai pu égale­ment regar­der de près l’offre IPTV multi-écrans de Veri­zon (FiOS) qui a l’air d’être assez com­plète, avec les chaines des grands net­works dis­po­nibles en strea­ming live sur iPad et autres écrans mobiles. Comme quoi, à l’instar de nos FAI en France, les opé­ra­teurs télé­coms ont encore leur rôle à jouer dans les TV connectées.

Télé­com­mandes

Com­ment pilo­ter sa TV ou sa set-top-box, tout comme ses consoles de jeu ? Les com­mandes ges­tuelles étaient très pré­sentes sur le salon. Résul­tat de l’effet “Kinect”, la solu­tion de Micro­soft pour la XBOX 360 qui s’est ven­due à 8 mil­lions d’exemplaires en deux mois, un record dans la sor­tie d’un nou­veau pro­duit grand public. Der­rière ces solu­tions, on trouve des four­nis­seurs de tech­no­lo­gies comme l’israélien Pri­me­Sense à l’origine de Kinect et qui licen­cie à tour de bras sa tech­no­lo­gie de chip­set et son refe­rence design, notam­ment chez Asus (ci-dessous). Vous ris­quez donc de la voir appa­raitre un peu par­tout. Sans comp­ter les tech­no­lo­gies des concur­rents de Prime Sense qui uti­lisent le “Time of Flight” pour détec­ter les mou­ve­ments (nous y reviendrons…).

On trou­vait aussi sur le salon un très grand nombre de petits cla­viers sans fil. Beau­coup plus que les années pré­cé­dentes. Que ce soit pour s’interfacer avec une tablette, un smart­phone ou un PC media center.

Des tablettes mises à toutes les sauces

Je ne vous appren­drai rien en vous indi­quant que l’on trou­vait plein de tablettes au CES.

La plu­part étaient sous Android et notam­ment dans la ver­sion Honey­comb qui sup­porte bien les inter­faces tac­tiles. On en trou­vait autant chez les grandes marques (Sam­sung, LG, Pana­so­nic, Acer, Asus, etc.) que chez les socié­tés chi­noises qui les fabriquent en stan­dard (OEM) ou sur mesure (ODM). À ceci près que les tablettes bas de gamme sont en géné­ral équi­pées de pro­ces­seurs bas prix ané­miques. Il faut s’en méfier.

Un phé­no­mène inté­res­sant : la fron­tière entre smart­phones et tablettes voire net­books s’amenuise. Il est incarné par l’Atrix de Moto­rola, son nou­veau smart­phone sous Android qui pré­sente la par­ti­cu­la­rité d’être asso­ciable à une docking sta­tion en forme de net­book très plat (ci-dessous). C’est très sédui­sant comme concept.

On trou­vait aussi des tablettes sous Win­dows avec ou sans cla­vier, notam­ment chez Dell, Sam­sung et Asus. Peut-être un revi­val des “Tablet PC” qui n’ont jamais vrai­ment percé sur le marché.

ebooks et e-readers

Côté ebooks, j’ai été sur­tout bluffé par l’écran e-paper en cou­leur Mira­sol de Qual­comm (ci-contre), pré­senté pour la pre­mière fois au CES. On attend tou­jours les ebooks qui en seront équi­pés. La pro­duc­tion de ces écrans, pour l’instant au for­mat 7 pouces,  aurait déjà démarré donc cela ne devrait pas tarder.

Les construc­teurs d’ebooks se dif­fé­ren­cient main­te­nant plu­tôt dans les offres de conte­nus que dans leur maté­riel, tel­le­ment ils sont stan­dar­di­sés autour des écrans pro­ve­nant d’e-ink.

Android partout

Le phé­no­mène est très mar­quant. On trouve Android mis à toutes les sauces : dans les tablettes, dans les smart­phones, dans cer­tains net­books, dans les TV et cer­taines set-top-boxes et même dans les auto­ra­dios. Sa gra­tuité n’y est pas pour rien. Mais peu d’appareils sont cer­ti­fiés Google et cha­cun a son propre “Appli­ca­tion Store”. Je vous expli­que­ pour­quoi dans mon rap­port CES 2011.

4G

Ce salon mar­quait aussi la mon­tée en puis­sance de la 4G dans la mobi­lité. Elle est pous­sée par les opé­ra­teurs (Veri­zon, Sprint, etc) comme par les construc­teurs (Sam­sung, LG, etc). Avec des déploie­ments qui vont varier d’un pays à l’autre. On pou­vait cepen­dant noter l’absence d’AT&T sur le salon.

Pro­ces­seurs

Un grand nombre des inno­va­tions évoquées ont comme ori­gine les évolu­tions des pro­ces­seurs embar­qués. Leur rôle est cri­tique et je vais le décryp­ter dans mon rapport.

On trou­vait au CES des socié­tés comme Intel mais aussi Qual­comm, Broad­com, ST Microe­lec­tro­nics, Mar­vell, Athe­ros, qui ont toutes des offres inté­res­santes. Qual­comm, encore lui, pro­pose main­te­nant son Sys­tem On Chip Snap­dra­gon en ver­sion bi-coeur, que l’on retrou­vait dans divers smart­phones. Idem dans la TV, où les Atom Soda­ville et Gro­ve­land (Intel), le 7225 de Broad­com et le 7108 de ST Microe­lec­tro­nics rendent pos­sibles la créa­tion des set-top-boxes de la nou­velle génération.

Le rôle de ces pro­ces­seurs embar­qués est tel que Micro­soft a annoncé au début du salon le sup­port de cer­tains d’entre eux, notam­ment sur archi­tec­ture ARM, dans la pro­chaine ver­sion 8 de Windows.

Il faut aussi noter le rôle tout aussi cri­tique des cap­teurs : gyro­scopes, GPS, accé­lé­ro­mètres, cap­teurs de pres­sion, de lumi­no­sité, qui s’intègrent dans tous ces objets numé­riques. Ces nou­veaux cap­teurs sont notam­ment uti­li­sés dans un tas de solu­tions dédiées à la santé, assez nom­breuses sur le salon.

J’ai même vu un nano­com­po­sant de spec­tro­gra­phie qui pour­rait ser­vir à amé­lio­rer le cal­cul auto­ma­tique de la balance des blancs dans les appa­reils photos.

De l’AppStore au Crapstore

Le « craps­tore » est un dimi­nu­tif décri­vant la variété de ces gad­gets maté­riels qui com­plètent les pro­duits Apple. On en trouve une quan­tité tou­jours incom­men­su­rable, avec la nou­veauté de l’iPad à laquelle tout “l’after mar­ket” s’est adapté en juste quelques mois.

Il y a bien entendu plein de trucs clas­siques sans grand inté­rêt (les pochettes en cuir, les coques en cou­leur, les sta­tions d’accueil) mais d’autres gad­gets peuvent être plein d’ingéniosité ou sur­prendre. Il en va ainsi de ce sys­tème de karaoké pour iPad (ci-dessous). La liste est très longue et vous aurez droit à un repor­tage photo com­plet de ces gad­gets dans le Rap­port CES.

De nom­breux Français

Il y avait beau­coup de Fran­çais au CES 2011, autant visi­teurs qu’exposants. J’ai décou­vert pas mal de socié­tés fran­çaises qui expo­saient pour la pre­mière fois, sans comp­ter les Fran­çais qui dirigent des PME inno­vantes à l’étranger (USA, Hong-Kong). Mon inven­taire des socié­tés fran­çaises expo­sant bat des records depuis que je visite le CES (2006). C’est un signal très encou­rageant du dyna­misme de nos PME innovantes.

Par­rot est l’une d’entre elles et est bien connue pour exploi­ter le CES pour ses grands lan­ce­ments. La société a encore mar­qué des points avec le lan­ce­ment de son auto­ra­dio sous Android, l’Asteroid (ci-dessous).

Voilà pour com­men­cer. Ce salon reste un émer­veille­ment tel­le­ment on y croise de nou­veau­tés, même si elles ne sont pas radicales. Les usages numé­riques sont infi­nis, les com­bi­na­toires illi­mi­tées. Il faut juste savoir conser­ver le regard d’un enfant émer­veillé lorsque l’on visite le salon. Sans comp­ter cette folle ville qu’est Las Vegas.

Retour et rap­port CES

Le rapport exploi­te une base de 4.400 pho­tos, 190 vidéos et 120 Go de conte­nus à trier, cap­tés avec mon Canon 5D Mark II. Du pain sur la planche ! Vous pouvez télécharger le rapport de Olivier Ezratty :


Vous pou­vez aussi regar­der les inter­views sous Skype réa­li­sées avec notre ami à tous Jean-Michel Billaut pen­dant toute la durée du salon (Day 1Day 2Day 3Day 4 et Day 5) !

Article initialement publié sur le blog Opinions Libre

>> photos de Olivier Ezratty / image de clé CC TechCocktail

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http://owni.fr/2011/01/24/ces-2011-le-rapport-complet-dolivier-ezratty/feed/ 2
MIDEM 2011 : Le paradoxe français ? http://owni.fr/2011/01/18/midem-2011-le-paradoxe-francais/ http://owni.fr/2011/01/18/midem-2011-le-paradoxe-francais/#comments Tue, 18 Jan 2011 09:38:53 +0000 unicum http://owni.fr/?p=29628 L’édition 2011 du plus grand salon professionnel de l’industrie musicale, le MIDEM, démarre dès ce week end à Cannes.

Emily d’Unicum Music nous livre son point de vue sur le décalage entre une politique économique française rétrograde dans son soutien à l’industrie, et l’accueille de cet évènement international phare.

A peu près au même moment l’année dernière où étaient réunies en France pour le sommet annuel du MIDEM tout ce que l’industrie musicale mondiale compte de personnes visionnaires et influentes, M. Zelnik remettait au Président de la République un rapport censé contenir toutes les mesures urgentes et nécessaires pour sauver notre industrie, toutes affaires cessantes.

L’idée n’est pas ici de disséquer ce rapport. C’est toujours facile de se prononcer un an après qu’il ait été publié alors que tout un chacun a pu constater l’échec ou la portée toute relative des diverses mesures préconisées et mises en place à ce jour. Non, le sujet n’est pas là. La vraie question pour moi est ailleurs.

Le disque, le disque, le disque !

Cet article est surtout né de la constatation d’un décalage paradoxal dans le même pays au même moment et sur le même sujet entre la timidité d’un rapport remis au chef de l’Etat et l’incroyable bouillonnement d’idées et la forte volonté d’innovation dans l’air au MIDEM.

Comment expliquer que nous hébergions LA conférence annuelle de référence pour toute l’industrie musicale à l’échelle mondiale mais que nous ne soyons pas capables d’y intéresser les acteurs au plus haut niveau de l’Etat?

Il aurait suffi de deux ou trois rapporteurs au MIDEM pour résumer et rendre compte de toutes ses incroyables conférences, de la diversité des facettes de l’industrie abordées, de l’audace et de l’ambition des pistes explorées pour « l’avenir de l’industrie musicale » pour permettre au Président de la République, si désireux de comprendre notre industrie et comment la faire avancer la tête haute, d’aborder la « crise » autrement que par le seul prisme du disque.

Car le rapport Zelnik a été conduit sous l’égide de quelqu’un qui vient du disque, conditionnant profondément la démarche qui ne visait plus qu’à sauver l’industrie du disque, consciemment ou non. Et encore : pas toutes ses composantes, au vu de tous les labels indépendants, les petites structures et artistes auto-produits etc.., qui sont les premiers touchés par cette crise et qui ne se reconnaissent pas dans ce rapport (comme en atteste le manifeste commun de la FEPPIA et CD1D “La Création Sacrifiée” à ce sujet).

L’industrie musicale ne se résume pas aux seuls labels et il y a d’autres acteurs essentiels à inviter à plancher sur l’avenir: les artistes, tout d’abord, à qui l’on ne donne tristement jamais voix au chapitre (et pas juste ceux qui vivent de leur musique parce qu’ils occupent le paysage depuis 10, 20 ou 30 ans), les tourneurs, les éditeurs, les managers, les marques, les médias et un panel de consommateurs de musique, citoyens dont les besoins de musique et usages de consommation évoluent au quotidien.

« Rien ne se perd, rien ne se créé, tout se transforme ». Lavoisier avait raison. C’est un peu la même chose pour la musique. La « consommation » de musique est en hausse constante depuis 2000 mais les ventes à l’unité s’effondrent. Les usages et les besoins se transforment. La valeur de la musique est à redéfinir. Le monde change, les acteurs aussi.

Beaucoup de personnes se sont contentées d’avoir un discours de justiciers en disant que les labels n’avaient que ce qu’ils méritaient parce qu’ils avaient fait leur beurre sur le dos des fans pendant des années avant. C’est un peu facile et ça ne répond pas vraiment à la question.

On peut déplorer au final l’occasion manquée d’une profonde introspection sur les véritables raisons de cet échec plutôt que de perdre plus de temps à identifier les coupables. Les acteurs centraux de l’industrie ces dernières décennies, dont l’arrogance et le déni de réalité les a amenés à renoncer à jouer un rôle central dans la façon de penser l’avenir, sont aujourd’hui presque plus à plaindre qu’autre chose.

L’exception culturelle ?

Mais au-delà même des nombreux arguments d’ordre juridiques, économiques, politiques etc…. le fond du « problème » tient peut-être aussi à quelque chose de spécifiquement français : la fondamentale ambivalence de notre rapport à l’Etat.

Quel que soit le gouvernement, nous sommes les premiers à défier l’Etat et son autorité, railler sa lenteur, son inefficacité, ses complications administratives et nous mobiliser pour préserver nos acquis. Mais lorsque nous nous retrouvons dans une impasse, une situation inconnue, notre premier réflexe est de nous (re)tourner vers l’Etat et le considérer comme le seul apte à nous sauver. Etrange paradoxe.

Face à l’inconnu, le réflexe systématique consiste à taxer les centres de profit et redistribuer la récolte sous forme de subventions. Et qu’ont été deux des mesures phares du rapport Zelnik ? Une taxe sur la publicité en ligne (centre de profits…) et la Carte Musique Jeunes (subvention à l’achat…).

Pourquoi toujours attendre de l’Etat qu’il légifère, qu’il régule, qu’il nous trouve la solution ? N’avons-nous pas confiance en notre capacité à nous débrouiller tous seuls ? A chercher et puiser en nous les solutions à nos problématiques ?

Peut-être qu’un jour il nous faudra nous voir et nous accepter tels que nous sommes : nous avons peur du changement, nous nous méfions de l’innovation et nous considérons suspecte tout avancée en dehors du cadre de l’Etat. Providentiel, forcément. Nous sommes encore terriblement scolaires. Nous en sommes encore à nous plaindre dès qu’un obstacle surgit parce que nous n’avons pas assez confiance en notre capacité à aller de l’avant et que nous ne sommes pas encore assurés d’avoir la meilleur place à la table du futur.

Mais pourquoi ce manque de confiance ? Pourquoi toujours glorifier les autres parce qu’ils ont fait ce que nous n’osons pas faire nous-mêmes ? Nous avons toutes les cartes en main pour avancer, se faire une place, frayer notre propre chemin mais la confiance en notre capacité à le faire nous fait défaut.

Et si la crise de l’industrie était en fait une crise d’adolescence ? Transitoire, nécessaire, une mue inévitable.

D’un côté, l’Etat, un parent désemparé et en décalage avec la nouvelle génération parce qu’il prend encore sa jeunesse pour repère. De l’autre, de jeunes adultes encore en devenir, désireux d’imposer leur marque et galvanisés par la découverte récente de leur propres aspirations, mais frustrés de ne pas savoir encore exactement comment les formuler ni les réaliser. Mais avec un regard vers l’enfance providence qui avait du bon… L’Etat serait comme un parent qu’on ne choisit pas, dont on a un peu honte à l’adolescence mais en creux duquel on se construit et sans lequel nous sommes perdus.

Le MIDEM est dans une semaine. La France est à l’honneur cette année. Les huit artistes présentés sont de qualité mais tous chantent en anglais. Pendant ce temps là, l’Etat, l’industrie musicale et les fans de musique se regardent encore en chiens de faïence. J’espère seulement que nous dépasserons cela un jour. Bientôt.

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UNICUM est une société de management d’artistes, d’éditions musicales et de conseil marketing et stratégique.

Cet article a été initialement publié sous le titre de Idioties #3 ou Le paradoxe français

Crédits photo CC Flickr : H e l l m a n, DavidDMuir, Mike Rohde

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Le pouvoir du prototype http://owni.fr/2011/01/17/le-pouvoir-du-prototype/ http://owni.fr/2011/01/17/le-pouvoir-du-prototype/#comments Mon, 17 Jan 2011 16:21:50 +0000 Sushi Suzuki http://owni.fr/?p=42771 Le prototypage a toujours fait partie intégrante du processus de conception et d’ingénierie ; mais les professionnels lui trouvent aujourd’hui de nouvelles applications, et mettent au point des méthodologies nouvelles pour profiter pleinement du potentiel des prototypes. Voici le premier volet d’une série sur le “design thinking” par les membres du groupe d.thinking Ponts Paris Tech.

A l’évocation du mot « prototype », se bousculent dans notre esprit les images de concept cars à l’allure racée dans un salon automobile, ou celles d’un gadget à une conférence de démonstration trois mois avant sa sortie. Pour les entreprises, les prototypes sont plutôt une étape coûteuse dont elles se passent lorsque c’est possible. Ces prototypes sont souvent des modèles sophistiqués conçus pour le développement ou la phase de pré-production, et généralement utilisés pour présenter un modèle à des clients ou pour tester un système (c’est par exemple le cas des voitures utilisées pour les crash-tests). Pourtant, les designers créent des prototypes à chaque étape du processus de conception et à des degrés de précision variés. Ce que nous connaissons par les médias ne représente qu’une infime fraction du potentiel du prototypage.

Communiquer à chaque étape

Les salons commerciaux sont pleins de prototypes et de démonstrations destinées à aiguiser l’intérêt du client et à faire monter son excitation. C’est l’une des utilisations possibles du prototype en termes de communication, mais différents prototypes peuvent être utilisés à différentes phases de la conception. Au début du processus, des prototypes très grossiers peuvent, mieux que des mots ou des images, faire passer des idées aux membres d’une équipe.

Prototype basique, Ideo

Chez Ideo, un cabinet de conseil en conception et innovation de la Silicon Valley, on raconte volontiers cette anecdote devenue célèbre : une équipe de consultants spécialistes de la conception travaillait pour Gyrus ACMI pour développer des instruments d’oto-rhino-laryngologie. Au tout début du processus de conception, l’équipe consultait un groupe de chirurgiens pour identifier les lacunes des alternatives existantes et les besoins des professionnels. Pendant la réunion, un consultant, qui voulait matérialiser une idée ayant émergé du groupe, assembla divers objets qui se trouvaient dans le bureau et fabriqua le prototype ci-dessus. Les chirurgiens se l’approprièrent immédiatement et commencèrent à discuter des points intéressants et des pistes d’amélioration possibles. Après plusieurs cycles de développement et de perfectionnement, Ideo aboutit au Diego Powered Dissector System, représenté ci-dessous. D’après Perry Mykleby, directeur du marketing senior de la division entreprises de Gyrus ACMI, Diego a triplé les revenus du segment des instruments électriques.

Diego Powered Dissector System, Ideo

Il est courant, lorsqu’on travaille avec des consultants ou des fournisseurs, de communiquer sur ses modèles grâce à de longs documents de spécification, en particulier pour les éléments fonctionnels. Dans certains cas, ces documents peuvent comporter des centaines de pages, mentionnant les plus infimes détails. Certains professionnels commencent à s’interroger sur cette pratique et choisissent de s’appuyer davantage sur des prototypes pour présenter leurs derniers modèles à leurs clients et à leurs fournisseurs. Todd Zaki Warfel, à l’origine du concept de design tourné vers l’utilisateur et auteur de « Guide du prototype à l’usage des professionnels », expliquait ainsi dans une interview au Johnny Holland Magazine : « Dans presque tous nos cas, ces trois dernières années, les prototypes sont devenus notre documentation. Il y a quelques exceptions, pour lesquelles nous avons besoin d’inclure, en plus de cela, une documentation, disons un document de 10 à 20 pages pour rappeler certaines règles propres au secteur qui sont à prendre en compte, et qui ne sont pas clairement exprimées dans le prototype. Mais je préfère faire une spécification de 20 pages et un prototype plutôt qu’une spécification de 200 pages. »

Construire pour penser

Dans les écoles d’ingénieur, on apprend aux étudiants à penser en profondeur avant de commencer à construire, et c’est ainsi que les professionnels travaillent. Mais plus le produit ou le système devient complexe, plus il devient difficile de prendre en considération tous les facteurs lors de la conception. Confrontés à cette réalité, les spécialistes de la conception ne se contentent plus désormais de penser pour construire, ils construisent pour penser. En se mettant au travail et en essayant de mettre sur pied des prototypes, les difficultés imprévues sont identifiées plus tôt, et les coûts liés aux modifications tardives de conception sont évités. Ce cycle itératif rapide de réflexion et de construction est ce qui permet aux concepteurs de produits d’apprendre rapidement par l’expérience.

Fabrication d’un prototype de tableau de bord automobile

L’approche « construire pour penser » est souvent bénéfique dans la conception d’interface. Par exemple, en essayant de concevoir un poste de pilotage automobile, on peut se contenter de lister l’ensemble des éléments, boutons, et manettes qui doivent y figurer. Mais en réalisant un prototype de la cabine, on commence vraiment à penser à la manière dont les différents éléments doivent se présenter au conducteur pour éviter la confusion, et maximiser le confort. Ceci permet ensuite au concepteur de procéder par itération sur le concept initial pour développer quelque chose de plus intuitif et de plus sophistiqué.

Testez tôt, échouez souvent et vous réussirez plus vite

Les spécialistes de la conception ont tendance à vouloir mettre au point le parfait prototype avant de le montrer et de le tester sur des utilisateurs. Mais la communauté du design de l’université de Stanford se réclame généralement d’une doctrine différente quand il s’agit de prototypes : elle peut se résumer par « Basique, rapide et adapté ». L’idée est que la raison d’être du prototype va au-delà de la communication ; il permet avant tout de tester des hypothèses et de répondre à des interrogations sur le concept. Les prototypes doivent donc être réalisés rapidement et être juste assez évolués pour répondre aux questions qui se posent au moment considéré. Par exemple, pour tester l’interaction entre les utilisateurs et des concepts d’interface de téléphone, une ébauche d’écran et de boutons ou un prototype fait à partir d’un logiciel sophistiqué monté sur un support grossier peuvent répondre à beaucoup de questions.

Au ME310 de l’université de Stanford, un cours de conception et d’innovation construit à partir de projets, un groupe d’étudiants s’est vu confié pour mission par BMW d’« améliorer l’expérience du plein air » dans une Série 3 décapotable. Comme le savent beaucoup de conducteurs de cabriolets, conduire sur l’autoroute avec la capote abaissée donne lieu à une circulation d’air curieuse, qui génère un courant d’air du siège arrière vers le siège avant. Il rabat les cheveux des passagers avant sur leurs visages et produit un bruit entêtant. Aujourd’hui la solution consiste à placer une vulgaire plaque grillagée sur les sièges arrières, transformant ainsi le cabriolet quatre places en un cabriolet deux places.

Prototype de base pour l’amélioration du confort d’un cabriolet

L’équipe étudiante, faisant l’hypothèse que le bruit était la principale source d’inconfort, créa en cinq minutes un prototype, représenté ci-dessus, pour tester l’effet d’une protection sur les oreilles du conducteur. Le test du prototype « lunettes de soleil et verres en plastique » confirma qu’éliminer le bruit améliorait grandement l’expérience de conduite en plein air. Le conducteur d’une BMW ne pouvant se permettre d’avoir l’air d’un clown sur la route, les étudiants testèrent ensuite les technologies de pointe en termes de limitation du niveau sonore, grâce au Bose QuietComfort 2, le casque le plus performant disponible sur le marché à ce moment-là. L’expérience montra que si le casque fonctionnait parfaitement dans un avion, il ne permettait pas d’éliminer le bruit généré par le vent dans un cabriolet. En consultant un professeur spécialiste du traitement du signal, ils s’aperçurent qu’aucune technologie ne permettait actuellement d’éliminer les bruits indésirables dans un cabriolet. Avec deux cycles d’itération et d’expérience avec prototype, le groupe d’étudiants a été capable de tester une hypothèse juste, une solution inappropriée, et de passer au concept suivant.

Prototype de système de contrôle basé sur la gestuelle

Pour un autre projet du ME310, un groupe devait créer pour Volkswagen une interface consacrée aux fonctions non reliées à la conduite : climatisation, équipements audio, etc.. Ayant noté les avancées récentes dans le traitement de l’image automatisé, l’équipe a rapidement identifié la reconnaissance gestuelle comme une alternative viable aux systèmes de boutons et de manettes qui prédominent actuellement. Cependant, avant de développer et d’adapter cette technologie à l’usage automobile, le groupe voulait vérifier qu’un tel système serait intuitif pour l’utilisateur. En un weekend, l’équipe construisit un simulateur de conduite et un ersatz d’interface ; les gestes étaient enregistrés par une caméra qui envoyait les images à un opérateur en coulisses qui agissait en retour sur le simulateur de conduite. En testant ce prototype, l’équipe put non seulement vérifier le caractère intuititif du contrôle gestuel mais également découvrir une ensemble de gestes venant naturellement à un conducteur. L’équipe passa ensuite les huit mois suivants à installer un vrai système de reconnaissance gestuelle dans un prototype de voiture.

Un prototype pour chaque objectif, un prototype pour chaque industrie

Lorsqu’on leur suggère de faire des prototypes très basiques et rapides, les professionnels répondent souvent : « Vous ne pouvez pas faire de prototype pour ce que nous faisons » ou « nous devons construire le modèle complet avant de le tester ». Cette réaction relève souvent d’un manque d’imagination et d’une incapacité à se projeter en dehors des normes existantes. Avec un peu de créativité, les professionnels de la conception et d’autres secteurs exploitent tout le potentiel du prototype pour développer leurs produits, leurs services, leurs process, etc..

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Les concepteurs de sites web et d’interfaces graphiques passent ainsi de plus en plus par des modèles sur papier avant d’écrire la moindre ligne de code. Programmer une interface graphique ou générer une image sur un écran prend beaucoup plus de temps que dessiner des captures d’écrans et les montrer à tour de rôle à la main. Le temps gagné en utilisant ces prototypes papier peut alors être utilisé pour tester d’autres concepts et les perfectionner davantage, avant d’écrire des programmes en code. La vidéo ci-dessus montre par exemple un web-designer en train de tester l’interface et la navigation d’un site web en jonglant entre les différentes captures d’écrans avec l’utilisateur.

Dans l’industrie du jeu video, EA Games, le plus gros éditeur de jeux vidéos américain, est connu pour faire des prototypes de ses jeux grâce à des cartes à jouer simulant les différentes interactions. Les premiers prototypes logiciels ne sont réalisés que lorsque les cartes sont devenues tellement sophistiquées que les essais deviennent trop laborieux. Encore une fois, les ressources préservées par l’utilisation de ces supports de prototypes grossiers permettent à EA d’explorer davantage de concepts et d’idées.

Dans le secteur des services, des prototypes d’expérience utilisateur, qui placent les utilisateurs dans un jeu de rôle simulant le service que l’on souhaite expérimenter, sont régulièrement crées. Durant la dernière décennie, outre l’industrie manufacturière, Ideo a travaillé avec de plus en plus de fournisseurs de services pour redéfinir ou créer de nouvelles expériences pour l’utilisateur. Parmi ses clients se trouvent la Croix-Rouge américaine, le groupe Mayo Clinic ou encore Bank of America. Lors des missions réalisées pour ces organisations, réaliser des prototypes d’expérience utilisateur était crucial pour créer et tester de nouveaux concepts de services.

Prototypage d’expérience utilisateur Crédits: Jonathan Edelman, Tangible Business Process Modeling in action

Même dans le monde des affaires et du management, des prototypes sont utilisés pour concevoir des processus de manière plus efficace. La modélisation de processus commerciaux se fait traditionnellement à travers des groupes de travail encadrés par des analystes spécialisés et des outils de modélisation informatique. Larry Leifer et Jonathan Edelman, chercheurs au Centre de recherche en design de l’université de Stanford et à l’institut Hasso Plattner en Allemagne expérimentent actuellement ce qu’ils appellent la Modélisation matérielle des processus métier (Tangible Business Process Modeling ou TBPM). La méthode TBPM utilise des vignettes de différentes formes et de différentes tailles sur lesquelles on peut écrire au feutre effaçable. Les chercheurs ont découvert que cet outil de prototypage très concret et très basique permettait de rassembler davantage de membres du groupe de travail pour participer à la création d’un modèle et au processus itératif. En utilisant des objets physiques que tout le monde sait manipuler, un plus grand nombre de personnes sont impliquées dans le processus de modélisation, permettant une itération plus rapide et des résultats de meilleure qualité. Il est question de commercialiser bientôt des « boîtes à outils » TBPM à l’usage des entreprises.

Retourner aux sources du prototype

La distinction claire entre produit final et prototype n’existe que dans l’histoire humaine récente. Avant l’ère industrielle, chaque produit était un prototype pour le prochain, les artisans tirant des leçons de chaque pièce qu’ils créaient pour l’améliorer dans sa prochaine version. Avec l’avènement d’une ère dominée par le raisonnement scientifique et analytique, les capacités de l’homme à concevoir et à produire ont atteint des niveaux sans précédents. Mais en même temps, l’homme moderne a été pris par un certain orgueil, imaginant qu’il pouvait « analyser » ce qu’il voulait, désirer, et ce dont il avait besoin. Dans un monde où les systèmes, les technologies et les sociétés sont de plus en plus complexes, ce qu’il nous faut aujourd’hui, c’est un retour aux fondamentaux, qui nous conduisaient à réaliser spontanément des prototypes et à trouver des solutions par l’analyse. Il faut exploiter pleinement le pouvoir du prototype !

Ce contenu est issu de ParisTech Review où il a été publié à l’origine sous le titre « Le pouvoir du prototype » sous la licence Creative Commons 3.0. Vous êtes libre de reproduire, distribuer et communiquer ce contenu.

>> photo flickr CC Alice Lucchin

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