OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Un nouveau paywall bien compliqué pour le New York Times http://owni.fr/2011/03/21/un-nouveau-paywall-bien-complique-pour-le-new-york-times/ http://owni.fr/2011/03/21/un-nouveau-paywall-bien-complique-pour-le-new-york-times/#comments Mon, 21 Mar 2011 14:30:36 +0000 Benoit Raphaël http://owni.fr/?p=52502 (Tous les liens sont en anglais sauf mention contraire)

À partir du 28 mars (et c’est déjà le cas au Canada), il faudra payer entre 15 et 35$ par mois pour lire le New York Times intégralement. C’est le modèle inventé par le journal américain qui revient à l’offre payante après un premier échec en 2005 : Times Select a été arrêté en 2007, après avoir rapporté 10 millions de $. A l’époque, Vivian Schiller insistait sur le fait que le modèle “avait fonctionné”, mais freinait l’accès au Times par les moteurs de recherche, et donc la croissance du média.

Aujourd’hui, la “Gray Lady” (le surnom du NY Times) revient avec un modèle très complexe, qui divise déjà les spécialistes.

Anil Dash, d’Experts Labs, le résume ainsi sur le Nieman’s Lab :

C’est très difficile de comprendre un modèle qui vous laisse lire 20 articles par mois, sauf si vous venez de Google, et dans ce cas c’est 150 articles par mois, mais seulement 5 par jour, sauf si vous avez payé 15$, 20$ ou 35$, sauf si vous avez déjà payé pour la version papier, mais seulement si vous êtes au Canada jusqu’à ce que le modèle soit élargi aux Etats-Unis…

Hum…

Essayer de prendre en compte d’où vient le lecteur

En résumé les trois offres payantes sont celles-ci :

  • 15$ pour l’accès web + mobile.
  • 20$ pour l’accès web + tablettes
  • 35$ pour l’accès aux trois supports.

Mais le système se complique pour l’accès gratuit progressif, destiné à éviter l’effet couperet du mur payant, qui a fait perdre au Times de Londres près de 90% de son trafic. David Cohn compare le modèle non pas à un mur mais plutôt à une rampe d’accès, ”comme celle de l’étoile noire dans Star Wars”, plaisante-t-il, sans doute pour souligner les vertus acrobatiques du système.

- Les abonnés au papier auront un “full access” (web+tablettes+mobile). Même si vous êtes abonnés seulement à la “week-end edition”.

- Par contre, l’édition Kindle doit être payée séparément (20$ par mois !) et ne donne pas accès au web.

- Vous pourrez lire jusqu’à 20 articles par mois, sauf si vous venez d’un “referer” c’est à dire que vous avez cliqué sur un lien depuis un blog, ou un réseau social comme Facebook ou Twitter. Après, précise Paid Content, c’est 3,75$ par semaine .

- Si vous venez de Google, c’est 5 articles par jour maximum. Ce qui veut dire que vous pouvez cumuler 150 articles par mois via le moteur de recherche + 20 via le site + autant que vous voulez via les réseaux sociaux (c’est Facebook qui va être content).

Trop compliqué, s’énerve Boing-Boing, qui se demande comment le NY Times va vérifier que l’internaute a dépassé son quota d’articles (un cookie ? une faille dans le navigateur ?) et surtout comment il va le justifier auprès des utilisateurs. “Personne n’est capable de se souvenir combien d’articles du NY Times il a lu dans le mois”, ni s’il venait de Google, d’un réseau social ou du site du journal lui-même, insiste le blog, qui prédit que les utilisateurs vont plutôt mal accueillir le message du NY Times les informant qu’ils ont dépassé leur quota, parce qu’ils seront incapables de vérifier si le robot se trompe ou pas.

Gordon Crovitz, ancien publisher du Wall Street Journal a fait ses calculs : le modèle payant va générer 100 millions de $, qu’il ajoute aux 150 millions de $ générés par la publicité digitale aujourd’hui. Il estime donc que la couche payante va s’ajouter aux revenus publicitaires sans les faire baisser. Crovitz justifie ses chiffres par les récupérées chez les clients du système de paiement en ligne pour les contenus, “Press +”, dont il est le fondateur. Paid Content tombe sur les mêmes chiffres.

Difficile de juger. Les prédictions sont partagées. Personnellement, je serai le dernier à jeter la pierre à des médias qui tentent de trouver des solutions pour payer leurs journalistes et la production d’infos de qualité. Le modèle publicitaire est payant pour quelques site, comme le Huffington Post et Politico, tous les deux rentables. Pour l’instant, personne n’a réussi à démontrer la viabilité d’un système de paiement du contenu d’infos, hors presse pro et business (payées par des professionnels), à large échelle. Des sites comme Mediapart commencent à voir le bout du tunnel  : ils prévoient la rentabilité en 2011, malgré une perte d’1,5 million en 2010, selon l’Expansion[fr], mais il est difficile de savoir ce que les utilisateurs paient vraiment : l’accès au contenu, la participation à un club (comme pour Le Monde.fr) ou un soutien au média ?

L’arrivée des tablettes n’a pas renforcé le modèle payant. Lequel ne peut-être envisagé que comme un supplément au modèle publicitaire. C’est à dire qu’il faudrait parvenir à faire payer une petite couche d’utilisateurs, sans détruire l’audience gratuite. La mécanique de la contrainte fonctionne plutôt bien pour les social games (les jeux sur les réseaux sociaux comme Farmville), mais il est très compliqué à faire fonctionner sur les contenus pour une raison simple : si une information importante est publiée sur un média payant, elle se retrouvera instantanément reprise par les autres médias, synthétisée, recoupée, voire enrichie.

Un modèle frustrant le lecteur

Le seul modèle que je vois aujourd’hui est celui de la couche payante façon club : vous payez un abonnement non pas pour avoir accès aux contenus, mais pour participer à un club, bénéficier d’avantages exclusifs (la carte Fnac, par exemple, est payante, mais vous permet de bénéficier de réductions et de facilités de paiement), voire de contenus exclusifs sous forme d’alertes ou de newsletters. Pour le reste, laisser l’accès libre à vos contenus amènera trafic, publicité, et un potentiel de nouveaux abonnés qui ne réagiront pas par frustration mais par envie. Bien plus positif.

Autre modèle : une sorte de Nespresso de la presse. Un contenu à super valeur ajoutée, dans un packaging de grande qualité (tablette, smartphone), associés à des services VIP valorisants et exclusifs, avec un effet club et réseau. Le tout porté par un marketing puissant, façon Apple ou Nespresso. Ce type de modèle s’adapterait parfaitement à une offre business ou conso.

Ce ne sont pas les choix du New York Times. Leur modèle a un avantage et deux faiblesses : il est suffisamment complexe pour laisser passer le trafic sans gêner la pub (à vérifier avec le temps, cependant), mais trop compliqué pour ne pas frustrer et énerver les utilisateurs habitués à la transparence et à la gratuité. Enfin, il est focalisé sur la vente de contenus, sans apporter d’autres avantages. Ce ne sera peut-être pas suffisant.

>> Illustrations FlickR CC by Kevin Prichard

>> Article publié initialement sur La Social Newsroom sous le titre Le New York Times dévoile son mur payant : trop compliqué ?

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Presse en ligne : les têtes passent au payant http://owni.fr/2010/03/04/presse-en-ligne-les-tetes-passent-au-payant/ http://owni.fr/2010/03/04/presse-en-ligne-les-tetes-passent-au-payant/#comments Thu, 04 Mar 2010 10:17:27 +0000 Vincent Truffy http://owni.fr/?p=9394 paywall

Trois petits cailloux sur le chemin du modèle économique de la presse en ligne. Jeudi dernier, dans un entretien au Point, c’est Marie-Odile Amaury, patronne du groupe du même nom et donc du Parisien, d’Aujourd’hui, de L’Équipe, de France Football, etc. :

« Comment prendre le virage numérique ?

Le potentiel existe, puisque les marques de presse sont les plus consultées après les moteurs de recherche. Il faudra bien qu’un jour le public paie, comme il paie le SMS dans un abonnement.

Aux États-Unis, Murdoch a amorcé le tournant vers le Web payant. Pourquoi ne prenez-vous pas le leadership de ce mouvement en France ?

(Rire) Je n’ai pas les épaules d’un Murdoch ni sa surface financière. »

Rien de très étonnant jusque-là : le site du Parisien est partiellement payant (seuls les articles d’ouverture de rubrique et de cahiers départementaux sont accessibles gratuitement) et si celui de L’Équipe est en accès libre, rien de ce qui est dans le journal ne se retrouve sur le site.

Puis c’est Benoît Raphaël, rédacteur en chef du site Le Post (groupe Le Monde avec une participation minoritaire de Lagardère) qui, annonçant son départ, écrit : « Avant tout, j’ai envie de contribuer à trouver des solutions pour monétiser le journalisme digital. Les pistes sont là, encore vacillantes. La publicité, le tout-gratuit, ne suffira pas. Sans financement, pas de journalisme. »

Un air familier ? Oui, ici, à Mediapart. Mais plus d’une fois on l’avait entendu dire précisément le contraire. Il y a un peu plus de six mois, par exemple : « Le premier problème du modèle payant est bien sûr de faire revenir en arrière toute une audience habituée à consommer, depuis quinze ans, des informations gratuitement et de ne pas tenir compte des nouveaux usages dans la manière de s’informer. »

Et sur Rue89, Françoise Benhamou, professeur d’économie, spécialisée dans celle de la culture et des médias : « La gratuité ? On l’a essayée et on l’a aimée. Comme on y prenait goût, on s’est imaginé qu’elle pourrait se généraliser, la manne publicitaire couvrant le manque à gagner occasionné. (…) Mais le monde enchanté de la presse gratuite a pris l’eau. Le magnat australien Rupert Murdoch l’a dit clairement : le gratuit, c’est fini. Ça ne marche pas. »

On l’a aussi lu moins catégorique, mais on peut lui faire crédit de n’avoir pas varié dans l’énoncé de sa solution, l’abonnement au bouquet : un peu d’Arrêt sur Images, un soupçon de Terra Eco, une cuillerée de Mediapart, du Rue89 dans les coins, saupoudré de Bakchich. Ou des combinaisons thématiques.

Si l’on ajoute à tout cela qu’El Mundo lance à la fin de la semaine Orbyt, une ambitieuse offre à 14,99 euros par mois, que Le Figaro et Libération ont créé récemment leur zone payante et que Le Monde a renforcé la sienne, on voit le parfait cul-par-dessus-tête réalisé par les sites d’information en deux ans, depuis le temps où la « gratuité » était l’évidence.

La petite musique est venue des États-Unis, il y a juste un an, avec Rupert Murdoch qui voulait généraliser l’accès payant aux sites de ses journaux. En juillet, avec le rédacteur en chef du Financial Times, Lionel Barber, annonçant qu’avant un an (donc dans quatre mois désormais), la plupart des sites d’information seraient payants. Et au début de l’année 2010, l’étalon, le New York Times qui dévoile les modalités pour amener ses lecteurs réguliers à s’abonner pour la consultation de son site dès janvier 2011.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Arthur Sulzberger Jr., propriétaire du New York Times : « Le papier restera une part importante de notre stratégie à long terme, même si les jeunes lecteurs habitués à lire les articles sur support numérique prennent une place plus importante. Mais si nous ne faisons pas payer pour notre contenu sur Internet et sur mobile, c’est la qualité de ces publications qui en pâtira. »

Elle débarque aujourd’hui en France, et c’est une bonne nouvelle pour la presse en ligne, car on peut difficilement avoir raison seul. C’est précisément ce qu’explique un article du magazine Forbes qui rappelle qu’en leur temps, les compagnies aériennes se sont mises à faire payer des services qui étaient jusque-là offerts, comme l’enregistrement des bagages.

En 2008, le prix du kérosène atteignait des plafonds et la rentabilité des vols baissaient d’autant. Impossible d’augmenter les tarifs des vols dans un environnement à forte concurrence. En mai 2008, American Airlines commença à imiter ce qu’une petite compagnie charter, Spirit Airlines, avait expérimenté près d’un an plus tôt : facturer l’enregistrement du premier sac. Avant la fin de l’été, cinq des sept grandes compagnies aériennes les avaient imitées.

Conclusion de Forbes : tout est une question de synchronisation. Personne ne veut être le premier à bouger. Mais une fois le pas franchi, les réticences tombent vite. Et de comparer cette situation avec celle de la presse en ligne : tant qu’il n’y avait que le Wall Street Journal, celui-ci était l’exception qui confirmait la règle du tout-gratuit. Après le mouvement du New York Times, les sites de presse ne tarderont pas à suivre le mouvement, et à déjouer les pronostics funestes de ceux qui lui promettent que ses lecteurs se détourneront massivement vers d’autres sources d’information.

Billet initialement publié sur le blog de Vincent Truffy

Photo …Tim sur Flickr

À lire sur le même thème, mais avec un point de vue différent, « Personne ne pense un seul instant qu’il devrait payer pour son journal » chez Mediatrend.

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Les paywalls n’ont aucune chance. Explication n°876 http://owni.fr/2009/09/21/les-paywalls-nont-aucune-chance-explication-n%c2%b0876/ http://owni.fr/2009/09/21/les-paywalls-nont-aucune-chance-explication-n%c2%b0876/#comments Mon, 21 Sep 2009 13:27:10 +0000 Nicolas Kayser-Bril http://owni.fr/?p=3798 Faire payer pour l’info sur le web, ça ne marche pas. Se mettre hors du gratuit, c’est se mettre hors des liens, se marginaliser. C’est ce que disait Versac lors de la sortie de Médiapart. On ne peut pas aller contre l’esprit du web.

Plus prosaïquement, je vois 3 obstacles majeurs à l’introduction du payant.

1. La culture du manque d’imagination

Une large minorité d’éditeurs pensent sérieusement à introduire des paywalls, en se fondant sur les modèles développés au siècle dernier. Ils ont déjà largement prouvé leur inefficacité, mais c’est pas grave !

Plus ça rate, plus on a de chances que ça marche. Des archives payantes aux abonnements au pay-as-you-read, le manque d’imagination des managers de presse en ligne est frappant. Tout le monde cherche à copier iTunes, alors même qu’un article n’a pas grand chose à voir avec un morceau.

2. L’économie du web favorise le gratuit

Economiquement, le problème est très simple à comprendre avec un peu de théorie des jeux. Imaginons que tous les médias décident, du jour au lendemain, de mener une stratégie coopérative et de faire payer pour l’accès à leurs contenus.

La masse des internautes butineurs, ceux qui ne consomme l’info qu’au compte-goutte, risque de ne pas vouloir délier sa bourse. Dès lors, rien n’empêche un entrepreneur un poil roublard de jouer au passager clandestin, en payant 1 fois pour les articles et en les republiant gratuitement en plaçant de la pub autour. C’est pas très légal, mais il doit pas être bien difficile d’obtenir un compte AdSense au nom d’une société bidon basée dans un pays exotique.

Et puisque les coûts marginaux sont nuls pour le passager clandestin, n’importe qui pourrait republier les articles et capter l’attention des non-payeurs.

D’une manière plus réaliste, le risque est de voir un des partenaires de la coalition payante quitter le cartel et faire cavalier seul sur le gratuit, accaparant les internautes qui refusent de payer.

Jouez avec les boutons ci-dessous pour voir à quelles conditions une coalition pareille pourrait tenir[1].

Cliquer ici pour voir la vidéo.

3. Les acteurs non-commerciaux se foutent bien du payant

Je m’alarmais l’autre jour de la montée en puissance des acteurs non-commerciaux sur le marché de l’info. Qu’ils soient financés par des gouvernements ou des industriels, leur but n’est pas de faire rentrer du cash, mais de porter la bonne parole de leur mécènes le plus loin possible.

Dès lors, ils n’ont aucun besoin d’abriter leurs contenus derrière un paywall. Au contraire, ils se réjouiront plutôt de la place laissée libre.

Ceux qui regardent avec espoir les plans à la Murdoch se foutent le doigt dans l’œil jusqu’aux cervicales. L’info n’a jamais été payante. Au siècle dernier, les petites annonces soutenaient les dépenses de l’éditorial. A nous de trouver de nouveaux moyens de financer une information indépendante et intéressante.


[1] En se basant sur un total de 13.3m de prospects pour un accès payant et 6 pages vues par visites. Ca correspond en gros aux chiffres de l’OJD pour le mois d’août et au nombre d’internautes en France divisé par 3, la proportion des internautes qui ont visité un site d’actu le mois dernier.

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