Les méfaits d’une grande audience sur Twitter

Le 18 août 2010

Obtenir un nombre important de followers est, avouons-le, un des objectifs dans la twittosphère. Pourtant il existe aussi des désavantages à en avoir trop : la conversation finit par devenir impossible. C'est l'idée émise par le blogueur Clive Thompson.

Parfois, il y a des histoires qui sont tellement intéressantes qu’il faut juste les raconter. Mais écrire un blog, c’est souvent donner son avis. Je suis pourtant également de ceux qui aiment beaucoup écouter les gens parler et apprendre de leurs paroles. L’article qui suit n’est donc pas véritablement de moi. Il a été écrit par Clive Thompson sur Wired [EN] et j’avais juste envie de le traduire pour le partager avec une audience francophone. Bien évidemment, je l’ai enrichi et me suis approprié le sujet.
Et, une fois que vous l’aurez lu, j’espère pouvoir m’enrichir de vos paroles et juste vous écouter en commentaire.

Lorsque nous parlons de réseau social, plus c’est grand, mieux c’est. Du moins, c’est ce que de nombreuses personnes pensent. Plus le nombre de personnes qui vous suivent ou sont amis avec vous est grand, plus vous êtes important et génial. C’est pourquoi nous sommes parfois tellement en admiration devant des personnes qui ont plus d’un million de followers sur Twitter.
Mais avoir une énorme audience sur Twitter peut avoir des points négatifs.

Lorsque vous passez de quelques centaines de followers à une dizaine de millier, quelque chose d’inattendu se produit : le principe de réseau social vole en éclat.

Prenons le cas de l’Américaine Maureen Evans.
Cette jeune femme utilise Twitter depuis ses tout débuts en 2006, où elle arriva rapidement à une centaine de followers. Comme de nombreux utilisateurs, elle appréciait la nature des conversations que faisait naître ce medium : un follower répondait à l’un de ses messages et d’autres followers allaient venir immiscer dans la conversation pour faire naître une véritable conversation.
Puis, en 2007, elle commença un petit projet sur Twitter : publier des recettes, chacune condensées en 140 caractères. Elle amassa très vite 3000 followers, mais sa communauté en ligne ressemblait toujours à une petite ville : parmi ses habitués, les gens se connaissaient et discutaient entre eux.
Mais alors que son audience grandissait encore et encore, dépassant les 13.000, le sens de communauté s’évapora. Les personnes arrêtèrent de discuter ou de lui adresser la parole.

C’était devenu totalement silencieux

s’étonna-t-elle.
Pourquoi ? Parce que la socialisation ne pouvait plus suivre. Une fois qu’un groupe a atteint une certaine taille, chaque participant commence de nouveau à s’y sentir anonyme. Les personnes qui semblaient proches, presque comme des amis, semblent soudainement trop importantes, et donc distantes.
“Elles ont l’impression qu’elles ne peuvent plus être celles qui feront la contribution utile”, explique Maureen Evans : donc la conversation s’arrête.

Retour à une diffusion de type radio ou télévision

Mais Evans n’est pas la seule. Cette histoire semble se répéter chez de nombreuses personnes qui ont gagné en popularité sur Twitter. Avec quelques centaines ou milliers de followers, elles s’amusent – mais dès que l’on franchit une certaine limite, le réseau social s’effondre et les médias sociaux ne sont plus sociaux du tout.
Il ne s’agit plus vraiment de discuter et de partager
puisque nous retournons à quelque chose qui ressemble d’avantage à une diffusion dans le pur style radio ou télévision.
Une personne avec plusieurs dizaines de milliers de followers va diffuser de l’information sans que les interactions soient aussi riches qu’avec 1000 followers.
Les followers vont partager l’information, la “retweeter”, simplement parce qu’il s’agit de la seule chose à faire.
Donner son avis ? Pour quoi faire ? Quelqu’un comme Eric Dupin (@pressecitron) doit recevoir plus de trente réponses à la moindre question.
Est-ce que vous pensez qu’il est possible ensuite de remercier/discuter/débattre avec chacune d’elle sans que cela devienne un job à plein temps ?
Lorsque vous avez 1000 followers, vous avez tendance à répondre à toutes les personnes qui vous envoient un message, voire à remercier pour chaque retweet.
Lorsque vous avez atteint 40.000 followers, le choix des personnes à qui répondre se fait de la même façon que sur le standard d’une radio. Cet “auditeur” a des propos intéressants, répondons-lui, donnons-lui la parole… même si cela signifie laisser l’immense majorité des autres personnes dans le silence.

Un outil pour anticiper  un trop grand cercle social ?

Et si la conversation devient plus difficile lorsque le nombre de followers dépasse un certain seuil, ce n’est pas seulement à cause de cette audience qui se sent intimidée. S’il est plus difficile pour les personnes de ressentir la même proximité avec une personne qui a 50.000 followers qu’avec une personne qui en a 500, la personne en question a aussi tendance à s’auto-censurer.
En effet, les personnes qui se retrouvent avec une audience énorme ont tendance à écrire de manière plus prudente, un peu comme un homme politique.

Clive Thompson terminait son article en se faisant la réflexion que, peut-être, fallait-il créer des outils qui récompenseraient l’anonymat, qui encourageraient à rester dans l’ombre. Il pense aussi à un service qui préviendrait les utilisateurs lorsque le cercle social devient trop grand pour être viable.
Je ne suis pas totalement convaincu par cette approche qui ne fonctionnera pas auprès du grand public, mais il a raison sur un point : être connecté à moins de personnes a un avantage : nous discutons avec eux, contrairement au fait de communiquer vers eux.

Billet initialement publié sur Web Tribulation

Image CC Flickr Desmond Kavanagh

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