Les territoires radiophoniques de l’analogique au numérique

Le 11 octobre 2010

Le passage de l'analogique des ondes modulées au numérique d'aujourd'hui modifie en profondeur le paysage radiophonique. Voici une passionnante analyse en profondeur des enjeux sociaux et esthétiques de cette mutation en cours.

Alors qu’il s’est assoupi pendant de longs mois, le laborieux débat français sur la radio numérique terrestre (RNT) ne va pas tarder à se réveiller… Espérons qu’il n’aura pas les yeux tout collés. C’est en effet pour les prochains jours/semaines que sont attendues les conclusions du troisième rapport sur la RNT commandé par l’actuel gouvernement, à l’ancien directeur de France Culture (entre autres titres) David Kessler. Avant que nous ne fassions un point plus pragmatique sur la situation politique, il nous a paru intéressant de diffuser une communication inédite de Samuel Ripault (Pali Meursault) prononcée au colloque “Vers la Post Radio”1 organisé par le GRER en 2009 à Paris. Brouillages – Les territoires radiophoniques de l’analogique au numérique déplace le débat du passage d’une technologie à une autre – en l’occurrence de l’Analogique des ondes modulées au Numérique aujourd’hui sur le web et peut-être un jour hertzien – sous l’angle inattendu des enjeux esthétiques et sociaux. Ce qui s’annonce avec l’abandon programmé de la FM, n’est-ce pas la fin de la radio comme espace public ?

Poser aujourd’hui la question de la radio numérique terrestre revient à interroger les usages d’un dispositif qui n’existe pas encore. Tâche d’autant plus ardue que, comme nous avons pu l’entendre au cours des discussions du présent colloque, ce que nous appelons “Radio” ne recouvre pas la même définition pour tout le monde, selon que l’on parle de dispositions techniques, de structuration légale ou de création sonore. En somme il s’agit de parler soit des modalités d’accès aux contenus radiophoniques, soit de la qualité radiophonique des contenus, mais il semble difficile d’avoir une vision transversale. À travers ces multiples points de vues aussi bien qu’à travers la multiplication des plateformes, il n’est pas garanti que l’avenir de la radio soit celui d’un seul dispositif médiatique, dont l’homogénéité serait maintenue par l’idée d’une “radio augmentée”, qui préserverait nos habitudes d’usagers de la radiodiffusion tout en empruntant à l’Internet ses possibilités multimédias et hypertextuelles.

Aussi, afin de comprendre les enjeux que recouvrent les mutations actuelles de la radio, il me semble important de commencer par interroger les paradigmes et les discours qui structurent, en deux dispositifs distincts et en deux manières de concevoir la communication médiatique, d’un côté, la radio analogique et, de l’autre, les réseaux numériques, plus précisément, la Radio FM et le Web.

Radio-instrument

La migration de la radiodiffusion vers le numérique ne constitue pas seulement un apport de nouvelles possibilités en terme d’accès à des contenus, mais signe aussi la disparition d’un ensemble d’éléments qui caractérisent la transmission analogique : brouillages, parasites, espaces laissés en friche sur les bandes de fréquences, versatilité de la captation hertzienne… Autant de particularités qui, tout en pouvant être considérées comme inutiles pour l’accès à des programmes, n’en constituent pas moins une part importante de la radio que nous connaissons. Autant de particularités qui, sans aucun doute, auront imprimé leur marque, tant sur nos usages d’auditeurs que sur notre “imaginaire radiophonique”.

Les progrès de la technologie analogique ont permis, dans une certaine mesure, de masquer ces perturbations indésirables, mais peut-être sans jamais nous ôter tout à fait de la tête que la radio, c’est quelque chose qui commence par grésiller. En parallèle de cette histoire-là, les artistes et les musiciens du 20e siècle se sont réapproprié la radio : non seulement en tant que dispositif de diffusion et de productions sonores, mais aussi en faisant du poste récepteur lui-même un véritable instrument, avec sa “gamme” particulière. Au début des années 50, la démocratisation du transistor ayant rendu les postes plus faciles à manipuler, ceux-ci trouvèrent leur place dans les orchestres de John Cage ou de Karlheinz Stockhausen, les sources sonores radiophoniques devenant une matière à part entière, voix ou parasites au même titre, réunis dans une même plasticité.

Cette “plasticité” particulière de la radio-instrument ne constitue pas la simple introduction d’un nouveau registre de bruits électroacoustiques dans la musique : à travers la captation radio, c’est d’abord un nouveau registre de gestes musicaux que Stockhausen introduit dans les partitions de pièces comme Spiral ou Kurzwellen, avec l’intention de développer un rapport “intuitif” à l’interprétation. De même, chez Cage, ce sont les possibilités d’aléatoire qui motivent son utilisation de la radio. Il l’explique dès 1951, à propos de sa pièce pour radio de 1951, Imaginary Landscape No.4, par la possibilité d’aller plus loin dans sa recherche sur l’indétermination qu’il n’avait pu le faire dans Music of Changes2.

Matière radiophonique

Si la radio-instrument a perduré dans la musique contemporaine, en véhiculant une esthétique particulière liée au brouillages et aux bruits parasites, elle témoigne également d’usages fondamentalement extra-documentaires du dispositif radiophonique, et rendus possibles par le médium radio lui-même. Autrement dit, des usages de la radio qui ne soient pas réductibles à la seule question des contenus radiophoniques et de leurs modalités d’accès. L’approche musicale du médium radio dans la musique contemporaine nous engage, plus largement, à considérer la diversité de la matière radiophonique. Ainsi, chez Cage, brouillages et programmes, au plus près de la réalité physique de la technologie hertzienne, sont les variations d’intensité d’un signal, et deviennent, dans la composition, les variétés de registre de la radio-instrument.

Plus récemment, des musiciens comme Keith Rowe ou Lionel Marchetti ont repris à leur compte cet usage musical de la radio, explorant les ondes afin de créer des paysages fictifs, peuplés de voix fugitives, brouillées ou incertaines, captées au hasard d’un moment3 . Il ne s’agit plus ici de venir perturber les règles classiques de la composition ou de l’interprétation, mais de solliciter une dimension dramatique, esthétique et poétique de l’écoute radiophonique, qui est déjà présente dans nos usages et ancrée dans nos cultures d’auditeurs, et que viennent solliciter les compositions de Marchetti ou les improvisations de Rowe. De fait, nul besoin d’être musicien pour avoir fait l’expérience d’un tel usage de la radio, qui ait d’avantage à voir avec la dérive qu’avec la consultation d’un programme : on s’est déjà tous amusé à suivre les modulations du signal, comme on visiterait un espace à la fois familier et imprévisible au gré des fréquences, que se soit par plaisir, pour tester le matériel ou pour jouer au blind-test…

S’il reste légitime de définir la radio à travers ses programmen frichees et ses contenus médiatiques plutôt qu’à travers les imperfections de la transmission hertzienne, l’absence de brouillage dans les modalités d’accès aux médias numériques permet cependant de faire une distinction entre la captation d’un signal par la radio analogique et la consultation d’un contenu, qui s’apparente d’avantage à nos usages documentaires des réseaux numériques. Cette première différenciation entre deux modes de réception médiatique, deux dispositifs qui tout en pouvant véhiculer un contenu identique impliquent des usages spécifiques, va nous permettre de distinguer, entre la radio analogique et les réseaux numériques du Web, deux manières de structurer l’espace de la communication médiatique et deux manières d’y “naviguer”.

Le paysage de la radio analogique

Au-delà d’une pièce qui, par nature, n’est jamais deux fois la même, la reprise d‘Imaginary Landscape No.4 plus de 50 ans après sa création4 révèle les transformations plus générales du paysage technologique, médiatique et social : les radios ne diffusent plus la même chose et plus de la même manière. C’est peut-être ce terme de “paysage”, tel qu’il apparaît dans le titre même de la pièce de Cage, qui permet le mieux de qualifier l’espace médiatique de la radio analogique.

Les partitions de Cage pour Imaginary Landscape No.4, Speech ou Radio Music reposent sur l’aléatoire de la captation, utilisant voix, bribes musicales ou perturbations électrostatiques au même titre, et le “paysage imaginaire” se dessine au gré du parcours hasardeux des interprètes parmi les voix, bribes musicales ou perturbations présentes sur la bande. Avec l’exemple de ces pièces, on peut se représenter la bande des fréquences radios comme une étendue continue, dont les variations d’intensité du signal constituent les reliefs. Ici, l’interface du dispositif technologique, sous la forme de la molette du tuner, devient le véhicule qui nous permet de nous déplacer dans le paysage radiophonique : de se promener au fil des fréquences ou de rejoindre le “lieu” particulier d’une station de radio.

L’espace médiatique de la radio analogique a donc sa consistance géographique particulière, elle-même fluctuante en fonction de notre position dans l’espace réel. Essentiellement, le paysage radiophonique que nous connaissons se dessine par une succession de vides et de pleins, signal ou absence de signal, mais il s’agit d’abord d’un espace concret, qui existe avant tout comme l’étendue des longueurs d’ondes : un espace vierge au sein duquel l’enjeu territorial apparaît au moment de sa colonisation par les signaux radiophoniques. De fait, les zones de brouillages, les espaces vides de la radio analogique ne sont pas du “rien” mais plutôt, à proprement parler, des espaces “en friche” dans le territoire radiophonique.

L’assemblage des documents numériques

Depuis longtemps, nous sommes habitués aux discours de promotion du Web, qui nous invitent à naviguer et à “surfer”. À y regarder de plus près, pourtant, cette représentation spatiale masque une toute autre structure des médias en ligne. Contrairement au paysage des fréquences radios, il n’est pas possible d’imaginer sur le Web un espace vide, une friche qui ne comporterait pas de données, car la navigation en ligne ne consiste pas à se déplacer sur la surface des disques durs, mais bien à appeler et à afficher successivement des documents sur son ordinateur. De ce point de vue, la navigation en ligne peut être comprise comme un usage strictement documentaire. Certains sociologues placent d’ailleurs cette “hypothèse documentaire” à la base de l’analyse des usages et des interactions en ligne5 . Dès lors, le réseau des données numériques accessible par le Web ne se représente pas tant comme un territoire ou un paysage que comme un assemblage, formé par la juxtaposition de contenus documentaires interconnectés, et que nous sollicitons successivement. Sa réalité géographique – ou peut-être “a-géographique” – a ainsi d’avantage à voir avec l’empilement vertical des listes de références des moteurs de recherche qu’avec la continuité horizontale de la bande des fréquences hertziennes.

D’avantage, ce qui distingue ces deux espaces c’est que, là où l’espace concret de la radio analogique préexiste à son occupation par les signaux, l’espace virtuel des contenus documentaires en réseau est constitué par les documents eux-même, et s’étend à chaque nouveau contenu mis en ligne. L’espace du réseau est ainsi virtuellement infini là où, fondamentalement, la bande des fréquences est un espace fini et contraint. À travers ces caractères spécifiques, les espaces médiatiques de la radio analogique et des réseaux numériques apparaissent comme deux représentations différentes du territoire, auxquelles correspondent différents modes d’organisation, de régulation des usages et d’exercice de l’autorité.

Un paysage politique

Le territoire analogique des ondes radio est à la fois continu dans l’espace, permanent dans le temps et variable en fonction du territoire réel. Comme celui-ci, il est aussi un espace fini et limité, et connaît ainsi des enjeux de structuration comparables : c’est-à-dire, en premier lieu, l’enjeu géopolitique de son occupation ou de son abandon, de son appropriation ou de son partage, de son découpage en zones communautaires ou privatisées.

En fonction des bandes de fréquences, l’espace radiophonique se structure selon des modes qui s’apparentent à ceux qui organisent nos espaces de vie en sphères publiques ou privées : espaces publics, partagés ou communautaires de la CB et des Ondes Courtes, espaces institutionnalisés ou privatisés des fréquences AM ou FM. Le paysage hertzien (c’est aussi valable pour la télévision) est à la fois économique dans la mesure où il se dessine en fonction des capacités d’accès aux technologies d’émissions, et politique dans la mesure où une autorité procède au partage du territoire médiatique et à son contrôle, à son découpage et à sa distribution en parcelles, adaptant ses outils législatifs en fonction des territoires réels couverts par chaque mode d’émission.

Cette structuration législative du territoire médiatique n’apparaît cependant pas d’emblée pour l’auditeur de la bande FM, qui peut, dans la mesure déterminée par les outils technologiques dont il dispose, accéder indifféremment à n’importe quel signal. Ici la captation radiophonique se distingue encore de la consultation du Web, qui implique éventuellement une confrontation avec le cadre légal dans le cas de sites réservés ou protégés, de contenus payants, de sites interdits aux mineurs, etc. Le cadre légal de la radio concerne seulement les producteurs des signaux émis, et c’est en se réappropriant les technologies d’émissions de manière artisanale que certains artistes permettent d’en mettre à jour les enjeux territoriaux.

La radio comme espace public

Ainsi, lorsque Tetsuo Kogawa ou John Duncan se réapproprient localement les bandes hertziennes de la radio FM ou de la télévision pour diffuser leur œuvres, ils viennent ainsi éprouver la consistance politique du dispositif médiatique, ils en font réapparaître les enjeux proprement territoriaux et la structuration légale. À Tokyo, au milieu des années 80, les diffusions de Duncan6 prenaient ainsi la place de la télévision nationale à la fin des programmes, au cours de performances limitées à l’échelle d’un quartier et ne dépassant jamais 12 minutes afin d’échapper à la police. De telles interventions se situent à la fois dans l’héritage activiste des Radios Libres et en filiation avec une histoire du happening : infiltrant simultanément l’espace public et l’espace médiatique. Avec elles, on est tenté de faire un parallèle entre les paradigmes qui structurent l’espace public et ceux qui composent le paysage des médias analogiques : d’un côté comme de l’autre s’établit une distinction claire entre la production de l’espace, qui se soumet à une autorité, et l’usage de ce même espace, qui est déterminé par une norme. Les diffusions pirates de Duncan ou la fabrication artisanale des micros-émetteurs de Kogawa 7 ne permettent de révéler et de questionner cette autorité que dans la mesure où elles sont, littéralement, des productions d’espaces, et font basculer l’usager du côté de la production.

Avec l’apparition des Radios Libres au milieu des années 70, la remise en cause de la constitution hégémonique du territoire radiophonique à travers les monopoles d’états comportait les mêmes enjeux de réappropriation des dispositifs de production médiatiques. Par la suite, la pensée libertaire qui animait les premières Radios Pirates s’est en quelque sorte dissolue dans la libéralisation de la bande FM, mais elle portait avant tout cette nécessité de réappropriation des moyens de production et de réouverture des espaces médiatiques que Duncan ou Kogawa ont ensuite repris à un niveau micro-politique.

Les histoires de Radio Alice à Bologne, puis de Radio Tomate à Paris, relèvent bien d’enjeux territoriaux : les incursions dans l’espace médiatique y sont inséparables des actions menées dans le territoire politique et social (occupations de l’espace public, squatts, manifestations…). Mais pour Félix Guattari et Franco Berardi, le “travail révolutionnaire des Radios Libres” était avant tout un processus de “déterritorialisation8 . Il ne s’agissait pas d’opposer une “contre-hégémonie au discours médiatique dominant9 ”, contenu contre contenu, mais de “provoquer le processus de déstructuration du système médiatique par la prolifération des sujets d’énonciation”. C’est-à-dire de substituer aux représentations monopolistiques ou privatisées du territoire une conception de la radio comme véritable espace public, dont une technologie démocratisée permet de se réapproprier les modalités d’accès.

À travers cette multiplication des sujets d’énonciation producteurs de l’espace médiatique, Berardi voit se dessiner, dans une perspective “rhizomatique”, la préfiguration de “la réalité techno-nomadique du réseau”. Au-delà de la différenciation entre deux dispositifs communiquant, il y aurait donc une filiation de l’un à l’autre : les réseaux numériques permettant d’occuper une position d’énonciation dans le territoire médiatique que la radio n’avait pas su offrir. Mais il reste à savoir comment les conditions d’exercice de l’autorité sur la production médiatique vont, à leur tour, se reterritorialiser dans le réseau, c’est-à-dire comment un nouveau paradigme technologique va se reconfigurer, déterminant la place et le statut de l’énonciation en ligne.

Internet ou la communication des sphères privées

Pour bien comprendre ce changement de discours, il est particulièrement intéressant de regarder du côté des mouvements activistes et subversifs. C’est en effet au fil de l’histoire qui va des Radios Libres à l’émergence des hacktivismes en ligne que la filiation apparaît le plus clairement. Une parenté directe qui a permis aux acteurs de ces mouvements de prendre la mesure des changements structurels et paradigmatiques du territoire médiatique, sans doute bien avant que les sphères institutionnelles ne se penchent sur le sujet.

Ainsi, les artistes du Critical Art Ensemble ont analysé dans leurs ouvrages manifestes parus au cours des années 199010 la manière dont, à son tour, le pouvoir devenait nomade, et se reterritorialisait dans la réalité fragmentaire du réseau. Pour eux, si les forteresses des pouvoirs traditionnels centralisés ont maintenues leur permanence symbolique, elles sont en réalité devenues des autorités diffuses et invisibles, s’incarnant dans un modèle organique. Les possibilités subversives d’infiltration de l’espace médiatique doivent elles aussi changer de forme, délaissant les champs de batailles du territoire radiophonique pour devenir des “virus” informatiques.

Dans les représentations idéalisantes qui viennent structurer le Web, l’enjeu n’est plus celui de la propriété du territoire médiatique, ni celui de la maîtrise des moyens de production. En reprenant l’hypothèse d’une constitution documentaire du Web, on peut avancer que le territoire médiatique du réseau se structure précisément sur la capacité de chacun à être un sujet énonciateur dans le réseau, c’est-à-dire à être co-producteur de l’assemblage documentaire et du territoire médiatique lui-même. Dans l’espace infiniment extensible du réseau, la propriété est ainsi postulée dans les conditions mêmes d’accès au territoire médiatique, chacun devant être avant toute chose propriétaire de son “adresse” et de son “domaine” en ligne.

Dès lors, la fonction de l’autorité régulatrice a bel et bien changée, là où il s’agissait, dans l’espace de la radio analogique, de partitionner un espace ouvert en zones privatisées, elle a désormais pour fonction de déterminer et d’organiser la communication entre des sphères privées. Idéalement, la loi s’efface derrière un principe d’auto-régulation, incarné en chaque point du réseau. Et dans les faits, les enjeux de légalité se déplacent vers la question de l’intégrité des identités en ligne et de la propriété intellectuelle des contenus.

Post-radio ?

Finalement, il semble qu’avant de se pencher sur la question de l’évolution des contenus d’un dispositif médiatique il soit nécessaire de s’interroger sur les régimes d’énonciation que celui-ci rend possible. De ce point de vue, la question radiophonique, à travers l’ensemble de ses dispositions médiatiques, de la FM aux ondes courtes, des Webradios à la RNT, devient peut-être celle de la pluralité des places et des statuts que la radio est à-même d’accorder à ceux qui parlent et à ceux qui écoutent…

Ainsi, la question de la “Post-Radio”, qui deviendrait en quelque sorte celle de la post-énonciation radiophonique, nous engagerait-elle à considérer, par exemple, l’avenir conjoint de la radio numérique et de la bande FM. L’abandon progressif de cette dernière par les médias dominants pouvant augurer, plutôt que sa disparition à d’autres profits, la possibilité de recomposer un véritable espace public radiophonique, propice à la prolifération des sujets d’énonciations, comme l’imaginaient Félix Guattari et Franco Berardi.

Crédits photos cc FlickR : gyst, Zellaby, t0msk, Un ragazzo chiamato Bi, bcostin, smif.

Article initialement publié sur Syntone.

  1. Colloque Vers la Post Radio, Groupe de Recherches et d’Études sur la Radio (GRER), Paris, 26-28 novembre 2009, Sorbonne/INHA. []
  2. John Cage, For the Birds in Conversations with Daniel Charles, 1984, Marion Boyars. []
  3. Voir notamment : Lionel Marchetti, Noord Five Altantica, Césaré, 2006; et Keith Rowe/Günter Müller/Taku Sugimoto, The World Turned Upside Down, Erstwhile, 2000. []
  4. À la Tate Gallery de Londres en août 2009. []
  5. Voir notamment, Fred Pailler, Les sites de rencontres sur Internet, quelle sociabilité ?, thèse de doctorat. []
  6. Voir : site personnel de John Duncan []
  7. Tetsuo Kogawa, A Micro Radio Manifesto. []
  8. Félix Guattari, Des millions et des millions d’Alice en puissance préface à Radio Alice, Radio Libre, Collectif A Traverso, Laboratoire de Sociologie de la Connaissance – Jean-Pierre Delarge, 1977. []
  9. Cette citation et les suivantes : Franco “Bifo” Berardi, Les radios libres et l’émergence d’une sensibilité post-médiatique, Multitudes, 2006. []
  10. Rassemblés en français dans : Critical Art Ensemble, La révolution électronique et autres idées impopulaires, L’éclat, 1998. []

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