[App] Gainsbourg: “Sous le html exactement…”
OWNI vous propose une balade dans les influences musicales et littéraires de Gainsbourg et vous invite à taguer le mur du désormais mythique 5, bis rue de Verneuil, où le chanteur habitait. À vos graff' !
“Tout travail créatif est dérivatif”. Cette évidence rappelée par QuestionCopyright.org n’aurait pas déplu à Serge Gainsbourg, qui a laissé à la chanson francophone sans doutes une des œuvres les plus complexes et protéiformes, par la multiplicité de ses influences, tant musicales que littéraires.
Combien d’artistes peuvent se targuer d’avoir à ce point manié les différents styles musicaux souvent pour le meilleur et reconnaissons-le aussi parfois pour le moins bon ? Un tour d’horizon de ses titres les plus connus suffit à mesurer l’ampleur du phénomène dans son processus créatif. Jazz germano-pratin du Poinçonneur des Lilas (1958), rythmes africains de Couleur café (1964), Melody Nelson (1971) peut être rattaché au rock progressif, Aux armes etc (1979) est du reggae pur jus, et on finit sur de l’electro-funk avec You’re under arrest (1987).
L’image de génial touche-à-tout reste méritée : Gainsbourg ne se contentait pas de faire de pâles copies mais se les réappropriait après digestion solidement arrosée. Brassens, Ferré, Brel, Barbara, pour riche que fut leur œuvre, n’étaient pas dans une démarche aussi exploratrice.
Qui pour prendre la relève ?
Même poids des influences sur son écriture, qui balaye un spectre de près de deux siècles, de la littérature classique à l’argot, des vers de Baudelaire au franglais. Et au-dessus, trois figures tutélaires planent :
- Arthur Rimbaud
- Nabokov et son roman Lolita, dont la figure éponyme traverse toute son œuvre
- Boris Vian, le “frère”, pour reprendre les termes de Juliette Gréco
Devant une telle somme d’influences parfois directes, certains ressortent l’accusation de pillage. Le critique rock Nicolas Chapelle répond que c’est un peu plus compliqué que cela, exemples à l’appui :
Il dépasse Vian dans la jonglerie verbale, avale les formules des réalistes, du jazz, du music-hall, ose tout, même l’impensable : croiser Fréhel avec Chopin, forcer Dvorak à dérouler un tapis rouge à sa pin-up, faire dîner l’exotisme et le classicisme au même banquet que Brassens.
Et de souligner qu’une telle démarche n’est pas à la portée du premier auteur-compositeur venu :
Pilleur ? Voleur ? Vulgaire ? Non. Gainsbourg est un érudit, et met son incommensurable culture au service de pièces populaires. Il s’agit presque d’une démarche didactique. Et qui diffère au final assez peu sur le principe de celle du sample.
Une démarche qui se rapproche de celle de David Bowie, pour Olivier Julien, musicologue spécialiste des musiques populaires à l’Université Paris-Sorbonne (Paris IV) :
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Gainsbourg, Bowie, deux génies de la musique contemporaine. Est-ce à dire qu’une telle race d’artiste n’est pas prête de faire d’autres petits, même parmi ceux qui se réclament de lui ? Olivier Julien est pessimiste :
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On préfèrera finir sur une note plus gaie : le chanteur débutant qui peinait à boucler ses fins de mois est un des rares artistes français dont la renommée a largement et de façon durable dépassé la francophonie, comme en témoigne les nombreuses reprises/emprunts, en particulier par des Anglo-Saxons : Beck [en], Mick Harvey [en], ex-guitariste de Nick Cave and the bad seeds, Blonde Redhead ou encore Elysian fields dans la compilation Great jewish music, la boucle (de sample) n’en finit pas d’être bouclée.
La plupart des citations de notre application sont extraites de la biographie de Gilles Verlant, Gainsbourg, disponible en livre de poche.
Textes et sons : Sabine Blanc et Julien Goetz
Design : Loguy
Développement : Pierre Roméra
Image de une tOad rehaussée par Loguy CC by – nc pour OWNI /-)
Écoutez les reprises de Gainsbourg par des artistes d’OWNImusic
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