La licence globalement morte au PS

Le 27 avril 2012

La licence globale, ou vie et mort d'une idée dans le champ politique. En particulier dans le champ du PS. Autour de François Hollande, lobbyistes de tous poils se sont employés à faire disparaître toute velléité de légalisation des échanges hors marché. À la veille du second tour de la présidentielle, ce gros cadeau ne leur a pas été refusé.

Si je suis élu, il n’y aura pas de légalisation des échanges hors marché, ni de contribution créative.

La phrase est définitive. Elle émane de François Hollande, dans sa lettre datée du 19 avril à l’Association pour la lutte contre le piratage audiovisuel (Alpa). En réponse aux inquiétudes de Nicolas Seydoux, président de la vénérable association et du groupe Gaumont, le candidat réaffirme ce qu’il avait déjà esquissé dans une tribune au Monde : les socialistes n’ont pas l’intention de s’aliéner le monde de la culture, traditionnel soutien du parti à la rose.

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Tant pis donc, si le candidat socialiste enterre une idée qui avait à peine eu le temps d’accéder à l’entourage d’un potentiel futur président de la République. La récréation est terminée, et ce que l’on peut considérer comme une ultime prise de position sur le numérique avant le deuxième tour douche définitivement les espoirs des défenseurs d’une remise en question des droits d’auteur à l’ère numérique.

Lobbys

Il y a quelques mois, les jeux étaient plus ouverts, mais une campagne présidentielle encourage l’expression décomplexée des groupes d’intérêt. De notre poste d’observation numérique, ce sont les industries culturelles qui ont fait preuve du plus grand activisme à l’égard des  candidats, et surtout des deux principaux.

On en avait perçu les prémices au cours des bisbilles qui ont opposé Aurélie Filippetti, chargée du pôle culture dans l’équipe de campagne et Fleur Pellerin, sa camarade en charge de l’économie numérique. La cristallisation des tensions s’est faite autour de l’inévitable Hadopi. Et, au-delà, d’une possible remise à plat du droit d’auteur, qui pourrait aller de paire avec le fait de légaliser l’échange d’œuvres culturelles protégées entre individus. Les deux jeunes femmes se disputaient d’ailleurs le droit de s’exprimer sur l’avenir de la Haute autorité.

Le débat engagé, les représentants du monde culturel se sont précipités dans la brèche.

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Les arguments des promoteurs d’une contribution créative et d’une licence globale ont été au mieux battus en brèche, au pire ridiculisés. Pas de place pour l’alternative. Après les prises de position de certains députés PS à l’assemblée nationale autour de la loi Hadopi, le secteur culturel avait pris ses distances avec l’appareil socialiste. Mais la campagne a été l’occasion de tenter de mettre fin à ce début de divorce. Lobbyistes, directeurs de société de gestion de droits, entrepreneurs culturels, ayants-droit et autres “influents” se sont ainsi rapprochés de Fleur Pellerin. Bien qu’en charge de la culture, Aurélie Filippetti était sans doute trop marquée par sa porosité aux arguments des tenants de la fameuse “légalisation des échanges hors marché”.

Changement

Cette fois, c’est sûr : la licence globale et l’un de ses corollaires, la légalisation des échanges hors marchands, est définitivement enterrée. Voulu par François Hollande, “l’acte 2 de l’exception culturelle française” verra les mêmes acteurs se réunir au cours de multiples tables rondes. Avec à l’agenda des sujets allant de la gestion collective des droits à la rémunération pour copie privée en passant par la nécessaire réforme de la chronologie des médias (c’est-à-dire les règles de diffusion dans le temps des oeuvres, cinématographiques notamment, sur différents supports. Voir à ce titre le récent débat organisé par l’Ina). Le tout en luttant contre la contrefaçon, bien entendu.

Et en repensant Hadopi, dont l’avenir, loin d’être incertain, s’éclaircit à nouveau. Comme le disait sa présidente en exergue du dernier rapport d’activité de la haute autorité :

Rendez-vous en juin 2012.


Illustration par l’excellent Christopher Dombres [CC-by]

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